Enquête au cœur d’une tragédie – Courrier International

Autour de Luis Moreno-Ocampo, les enquêteurs de la Cour pénale tentent de poursuivre des criminels.

Un épais brouillard enveloppe cet après-midi-là les arbres et les réverbères de La Haye ; une cité paisible bâtie autour de ses canaux, une ville de galeries d’art, de boutiques de mode, de toiles de Vermeer et d’Escher. Mais ce n’est pas pour ses boulevards chargés d’histoire que le nom de La Haye évoque quelque chose à des hommes et des femmes du monde entier, en Ouganda, à Sarajevo, et aujourd’hui au Soudan. Pour eux, elle incarne d’abord un espoir de justice, quand l’Etat s’est effondré ou mué en instrument de terreur. Pendant la guerre en ex-Yougoslavie, c’est à La Haye qu’a été installé le tribunal spécial qui a engagé 161 poursuites. Et c’est là que siège désormais la nouvelle Cour pénale internationale (CPI), qui enquête sur les crimes contre l’humanité commis au Darfour.

La cité hollandaise symbolise à la fois les promesses du droit international et ses terribles lacunes. Nous vivons dans un monde où la nouvelle d’un génocide nous parvient en temps réel ; mais il est presque écrit d’avance que la communauté internationale n’interviendra pas militairement pour l’arrêter. Les milices janjawid, recrutées parmi les tribus arabes du Darfour et du Tchad et soutenues par le gouvernement soudanais, continuent donc d’attaquer, de violer et de tuer les villageois des tribus africaines – les massacres ont fait à ce jour plus de 200 000 morts et 2 millions de déplacés. En mars de l’année dernière, la CPI a été saisie du dossier par le Conseil de sécurité de l’ONU. C’est ainsi que, dans une petite ville hollandaise tranquille, les exactions commises au Darfour sont devenues l’obsession d’une remarquable équipe d’enquêteurs.

Le procureur général de la Cour pénale internationale s’appelle Luis Moreno-Ocampo. La petite cinquantaine, l’avocat argentin sait combien sa position est délicate. “Je suis un procureur sans Etat : j’ai cent pays sous ma juridiction et pas un seul policier


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