3 mai, deuil électoral – N’DJAMENA BI-HEBDO N° 946 du 1er mai 2006
Les organisations de la société civile parties prenantes de l’Initiative paix et réconciliation appellent la population à observer une journée de deuil électoral le 3 mai prochain.
En appelant à la désobéissance civique le 3 mai, les organisations de la société civile invoquent le préambule de la constitution qui autorise les citoyens à résister et à désobéir àtout individu ou groupe d’individus, à tout corps d’Etat qui prendrait le pouvoir pouvoir par la force ou l’exercerait en violation de la constitution.
Parmi les griefs formulés contre l’organisation de cette élection, la société civile relève que le découpage électoral n’obéit à aucun critère objectif. « Les régions les moins peuplées se voient attribuer un nombre important de députés alors que les régions les plus peuplées ont moins de députés. Par exemple, la localité de Djedda au nord d’Ati, qui compte moins de 40.000 habitants, a un siège, alors que la ville de Krim Krim dans le Logone occidental, qui compte 87.000 habitants, a aussi un seul député ». Ensuite, le recensement électoral, organiséde porte à porte, a favorisé une inscription sélective. « Les personnes supposées non favorables au Mps étaient délibérément évitées. Dans certaines localités, seuls les détenteurs de la carte du parti Mps avaient le droit de s’inscrire ».
Enfin, pour la Céni, l’organe chargé de cette élection, la société civile note que ses membres sont tous issus du parti au pouvoir et ses alliés, ce qui ne garantit pas la neutralité et l’indépendance de « cet organe déterminant pour la transparence du scrutin ».
En outre, la société civile reproche à Idriss Déby Itno son insolence. Très souvent, il tient à l’endroit de l’opposition démocratique et de la société civile des propos méprisants tels que « le chien aboie, la caravane passe » ou « je ne suis pas venu par billet Air Afrique ».
Le dialogue avant l’élection
C’est pour corriger ces anomalies du code électoral et créer les conditions d’organisation des élections libres, transparentes et acceptables pour tous que la société civile a demandé la tenue d’un forum national devant regrouper tous les acteurs de la vie publique. Le pouvoir a répondu qu’il n’est pas opportun d’organiser le dialogue national avant l’élection présidentielle. Or, faute de ce dialogue, la Coordination des partis politiques pour la défense dela constitution menace d’empêcher la tenue du scrutin, tandis que l’opposition armée menace de marcher sur N’Djaména. Si malgré toutes ces menaces Déby ne reportait pas l’élection, à quoi bon un dialogue post-électoral? se demandent les organisations de la société civile qui ont rallié à leur proposition de forum national la communauté internationale et les acteurs de la vie publique sauf le gouvernement.
En solidarité avec la société civile tchadienne, la société civile française a écrit au président Jacques Chirac qui soutient 101 à bout de bras pour lui demander de cesser d’apporter son soutien à Idriss Déby. Dans son appel au président Chirac, la société civile française a écrit: « Nous pensons que la politique française pour garantir la stabilité du Tchad et de la sousrégion par le soutien au régime de Déby est un échec. Nous pensons également qué la stratégie française de sortie de crise, basée sur la réélection (inévitablement frauduleuse) du président Déby suivie d’un dialogue incertain exacerbera en fait les tensions et violences politiques dans ce pays. Le remplacement de Déby par un autre seigneur de guerre serait également une stratégie inopérante ».
Hubert Bénadji
N’DJAMENA BI-HEBDO N° 946 du 1er mai 2006