Idriss Déby Itno en colère – N’DJAMENA BI-HEBDO N°951 du 22 au 24 mai 2006

Entre le triomphe et l’investiture, Idriss Déby Itno devra mener une nouvelle bataille. La troisième de l’année 2006 contre les rebelles qui s’annoncent à l’est du Tchad.

Au cours d’une réunion du Bureau politique natio­nal du Mps tenue le mer­credi17 mai 2006, Idriss Déby Itno est entré dans une grande colère contre l’am­bassadeur des Etats-Unis d’Amérique, Marc Wall, l’ac­cusant d’être en complicité avec les rebelles qui ont tenté de marcher sur N’Djaména le 13 avril der­nier. Pour le chef de l’Etat, les Américains savaient que les rebelles allaient faire le coup mais n’ont pas daigné l’en informer. Surtout que l’attaque a eu lieu après un jour de fermeture de leur am­bassade.

La colère du chef de l’Etat n’est pas étrangère à la dé­claration du département d’Etat selon laquelle les Etats-Unis se sont déclaré déçus par l’organisation de la présidentielle et comptent s’investir à ce que les légis­latives se déroulent dans de bonnes conditions. Déby n’a jamais été pour l’améliora­tion du système électoral. A cette même réunion, IDI a demandé au Mps de rompre avec la pratique qui consiste à n’aller voir les électeurs que pour solliciter leur suf­frage. Il faut donc repartir re­mercier les électeurs.

A Khartoum, le milieu des rebelles tchadiens connaît une effervescence depuis l’arrivée de Mahamat Nouri dans le maquis. De nom­breux dignitaires du régime de Hissène Habré l’ont re­joint. On cite notamment Guihini et un certain Assileck Allata. Le réveil des habréistes inquiète au plus fort N’Djaména qui ne cesse de faire des consultations dans le milieu des sages du Borkou Ennedi Tibesti (Bet) pour faire revenir Nouri à la raison. Mais selon nos infor­mations, les anciens con­sultés ont répondu au chef de l’Etat qu’ils ne comptent pas négocier une réconcilia­tion pour le compte d’un personnage aussi versatile que lui. Jusqu’aujourd’hui, beau­coup de Tchadiens s’interro­gent sur le mobile de l’en­trée en dissidence de ce vieux briscard qui est à la porte de la retraite. On est tenté de penser qu’il a été consulté par une puissance qui lui aurait donné des ga­ranties. En tout cas, l’enga­gement d’un personnage aussi expérimenté que lui aux côtés de la rébellion n’est pas fortuit.

De sources proches des forces de sécurité signalent des mouvements de troupes rebelles vers le Tchad en passant par la Centrafrique. Les rebelles en provenance du Soudan côtoient un vil­lage centrafricain nommé Birao pour remonter vers la frontière tchadienne. Certai­nes informations font même état de combats le 18 mai 2006 dans la région de Tissi aux confins des frontières Tchad-Soudan-Centrafrique. Pendant ces combats, l’ar­mée gouvernementale, en­cerclée, a connu de pertes importantes, notamment un officier supérieur. Ces infor­mations n’ont pas été con­firmées par le gouverne­ment. Néanmoins, des mou­vements de troupes de l’ar­mée gouvernementale ont été observés en direction du sud-est.

Ces mouvements, asso­ciés aux incursions de la se­maine dernière, annoncent une nouvelle tempête. Sur­tout que sur le plan militaire, la coordination des forces rebelles est établie et fonc­tionne normalement. La seule difficulté se trouve au niveau de la coordination politique. Après avoir tenté en vain de créer une unité politique des rebelles, les Soudanais auraient laissé libre cours à chacun des mouvements d’aller de son côté. En attendant d’avoir la confirmation de l’existence d’un commandement de la rébellion dirigé par le trio Mahamat Nour-Abakar Tollimi-Mahamat Nouri, il faut noter que les différents mouvements rebelles sont divisés. Les tentatives de regroupement ayant toute échoué. La première est celle du Rdl qui se présente comme un mouvement ouvert à tous ceux qui vou­laient en finir avec Idriss Déby. Le Rdl a fini par se constituer et malgré les pour­parlers en vue de créer un mouvement fédérateur avec le Socle pour le change­ment, l’unité et la démocra­tie, il s’est lancé tout seul à la conquête d’Adré le 18 dé­cembre. Après cet échec, une deuxième tentative a eu lieu fin décembre2005-dé­but janvier 2006 aboutissant à la création du Front uni pour le changement démo­cratique (Fucd). Laquelle tentative a encore échoué à cause des querelles de lea­dership. Les Soudanais avaient réussi à placer Mahamat Nour à la tête de ce mouvement mais au mo­ment du regroupement des troupes, le patron du Rdl a déplacé ses éléments de nuit à 50 kilomètres du lieu du cantonnement consacrant ainsi la rupture avec le Scud. On reproche d’ailleurs au patron du Rdl d’avoir une haine viscérale pour les Zaghawa. C’est ainsi qu’il s’est lancé seul une – se­conde fois à la conquête de N’Djaména pour se casser le nez aux portes de N’Djaména. Nonobstant, les rebelles préparent la guerre. A moins que les mouve­ments qu’ils ont opérés ces dernières semaines ne vi­sent autre chose.

Madjiasra Nako
N’DJAMENA BI-HEBDO N°951 du 22 au 24 mai 2006


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