Les rebelles de l’Ufdd inquiètent N’Djaména – N’DJAMENA BI-HEBDO N° 987 du 26 au 29 octobre 2006

A N’Djaména, le gouvernement feint de minimiser la menace représentée par les attaques lancées dans le sud-est du pays par l’Ufdd dirigée par Mahamat Nouri. Mais l’information sur le tir d’un avion français par un missile SAM7 des rebelles inquiète sérieusement N’Djaména qui évoque à nouveau une agression.

Depuis le 22 octobre, N’Djaména vit la psychose du 13 avril 2006, jour où les rebelles Fuc de Mahamat Nour ayant quitté le territoire soudanais, ont attaqué la capitale. Des chars exposés dans les rues, notam­ment aux alentours de la présidence, empêchent les tra­vailleurs de vaquer normalement à leurs occupations; des véhicu­les militaires et non militaires bourrés d’hommes et d’armes sortent de la ville ou sillonnent les rues, sous le regard inquiet des paisibles citoyens; les quartiers périphériques du nord et du nord­ est sont encerclés par des mili­taires; les voyages à bord de vé­hicules civils vers le nord du pays sont annulés; etc.

Telle est l’ambiance qui prévaut à N’Djaména en cette période de fête de ramadan. Ici, tout se passe comme à la veille de l’ « exploit » du 13 avril 2006. La psy­chose des N’Djaménois est due à la similarité affligeante de l’am­biance et des informations de la veille de l’attaque de N’Djaména par les éléments du Front uni pour le changement démocrati­que (Fuc) le 13 avril 2006.

Le 22 octobre 2006, les élé­ments de l’Union des forces pour la démocratie et le développe­ment (Ufdd), une coalition de trois mouvements rebelles dont la création venait d’être annoncée le même jour, ont, à bord de quel­que 70 Toyota tout terrain, atta­qué et pris le contrôle de la loca­lité de Goz-Béïda avant de pour­suivre leur progression jusqu’à Am Timan, qu’elle occuperait ac­tuellement.

Cette nouvelle alliance est composée du Conseil démocra­tique révolutionnaire (Cdr) dirigé par Acheick Ibn Oumar, ancien ministre des Affaires étrangères du régime Habré; de l’Union des forces pour le progrès et la dé­mocratie (Ufpd) de l’ancien mi­nistre de la défense (2001 à 2003), le général Mahamat Nouri, qui a rejoint la rébellion en mai dernier depuis son poste d’am­bassadeur en Arabie Saoudite; et d’une aile du Front uni pour le changement démocratique diri­gée par Abdelwahid Aboud. Elle serait dirigée sur les théâtres d’opération par des ressortissants de la région de Salamat, donc qui connaissent bien le ter­rain.
Du côté du gouvernement on feint de minimiser le danger. « Vous parlez de nombre mais moi je les ignore », raconte une personnalité à notre confrère Le Progrès. Le porte parole du gouvernement, Moussa Doumgor, quant à lui, a demandé, dans un communiqué de presse du 23 octobre 2006, à la population de garder son calme et de vaquer normalement à ses occupations car, dit-il, « les aventu­riers n’ont aucune chance face à la détermination des forces armées nationales tchadiennes qui sont prêtes à leur réserver le même accueil d’avril 2006 ». Les forces gouvernementales suivent bien les mouvements des rebelles dont l’objectif serait de « se mani­fester sur le terrain profitant du fait que les villes investies ne comp­tent pas de présence militaire si­gnificative », a également indiqué dans son communiqué le minis­tre de la Communication.

Rien de tout cela. Les attaques rebelles affectent sérieusement le Palais rose et le gouvernement dont les membres n’ont pas fêté normalement la fête de ramadan. Certains ministres ont passé leur journée ensemble au bureau du ministre de la Défense, Bichara Issa Djadallah. Les mouvements dans la capitale le dimanche et le lundi le confirment bien.

A Mongo, la population vit éga­lement dans la psychose à cause de la progression effrénée diman­che et lundi des éléments de l’Ufdd. Les renforts de N’Djaména arrivés après le retrait des rebel­les, sont massés dans cette ville pour arrêter toute tentative de pro­gression vers N’Djaména par les rebelles.

Ce déploiement impression­nant des éléments de l’Ant, n’in­quiète apparemment pas la ré­bellion de l’Ufdd qui, le lundi 23 octobre 2006, a tiré sans l’attein­dre un avion de reconnaissance français. En effet, ledit appareil, Breguet Atlantique de l’armée française, a été la cible d’un mis­sile sol-air, selon les autorités françaises, qui indiquent que le type de missile tiré serait un SAM7.

Cette information inquiète par­ticulièrement N’Djaména qui ac­cuse Khartoum avec qui il a si­gné un accord en août dernier, de fournir des armes d’une telle ca­pacité à l’Ufdd. Selon le porte ­parole du gouvernement, Hourmadji Moussa Doumgor sur les antennes de la Rfi, « cela donne la dimension de l’agres­sion dont nous sommes victi­mes… Nous sommes agressés par des forces qui sont venues de quelque part; qui ont reçu une lo­gistique importante; des véhicu­les, une centaine, et avec des armes importantes. Donc ces ar­mements, quelqu’un a donné quelque part. Ils ont une base à partir de laquelle ils sont venus. Donc il n’y a pas de photos. Nous avions toujours dit qu’il y avait des troupes organisées en territoire soudanais dans le Darfour et c’est de cette base qu’elles sont ve­nues. Donc, c’est toujours du Sou­dan ».

En même temps, cette informa­tion déstabilise les forces gou­vernementales qui seront obli­gées de revoir leurs stratégies militaires.

Du côté des rebelles, on ne connaît rien de leur stratégie. « Nos hommes sont maintenant dans les parages d’Am Timan et à Am Timan centre. Je ne peux pas dire dans quelle direction nous allons nous diriger dans les jours à venir. Pour l’instant nous sommes dans la région d’Am Timan (…) nous n’avons pas l’intention d’aller à Mongo », a indiqué le président de l’Ufdd, Mahamat Nouri, interrogé par Rfi. « Nous ne sommes pas très loin de Mongo. Ce n’est pas forcément notre prochain objectif mais ça dépend des choix tacti­ques de notre état-major ».

Alladoum Nadingar
N’DJAMENA BI-HEBDO N° 987 du 26 au 29 octobre 2006


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