Elections présidentielles sous haute tension – LE TEMPS N° 477 du 3 au 9 mai 2006

Le président de la république Idriss Deby Itno et le président de la Commission Electorale Independante Nationale (CENI) Mahamat Bachir font fi des appels de l’opinion nationale et internationale pour le report des élections présidentielles prévues le 3 mai 2006. Pourtant le pays est au bord de l’implosion généralisée faute d’absence totale de dialogue entre les acteurs de la vie politique tchadienne. Fidèle à sa logique aussi bien « du chien aboie et la caravane passe » que celle de « je ne suis pas venu par un billet air Afrique », IDI fait montre d’un refus catégorique d’ouverture politique et de dialogue national. Et ce, ni avec l’opposition démocratique ni avec les politico-militaires.

Ceux-ci sont purement et simplement taxés des mercenaires à la solde du régime de Khartoum qui cherche par tous les moyens à déstabiliser les institutions républicaines du Tchad. Quant aux partis politiques de l’opposition, ldriss Deby Itno n’a cure de leurs nombreuses propositions de sortie de crises. Il en est de même pour les organisations de la société civile qui ont prêché la tenue du forum de la paix et de la réconciliation. En réaction, les partis politiques regroupés au sein de la CPDC et les organisations de la société civile membres du comité national du suivi à l’appel à la paix et la réconciliation ont décidé d’adopter une stratégie commune face à l’intransigeance du pouvoir: boycotter les élections présidentielles du 3 mai 2006 comme ce fut le cas pour le référendum du 6 juin 2005 pour la révision de la constitution. Celle-ci a ouvert à lDI, la voie à un mandat illimité et une présidence à vie. Si l’opposition démocratique a choisi la voie pacifique pour s’opposer au refus d’alternance démocratique au pouvoir, l’opposition armée, pour sa part a opté d’intensifier sa lutte violente pour empêcher la tenue des élections présidentielles comme prévues voire accélérer la chute du régime de IDI. Et ce, en mettant sur pied une coordination militaire conjointe qui regroupe les forces du FUC et celles du RAFD sous la responsabilité d’un état-major intégré. Comme quoi, faute de consensus et compromis politiques entre les acteurs de la scène politique nationale, plus la date du 3 mai s’approche, plus les Tchadiens sont gagnés par une psychose d’une guerre fratricide. Déjà nombreux sont des Tchadiens qui ont quitté le pays à la cherche d’asile dans les pays voisins ou encore dans des pays beaucoup plus éloignés du Tchad. Ceux des Tchadiens qui ne peuvent ou ne veulent s’exiler s’empressent à faire de stocks alimentaires pour des lendemains incertains. Quant à la couche la plus démunie des Tchadiens – d’ailleurs majoritaire- qui n’a ni les moyens pour s’offrir un exil ni les moyens pour s’approvisionner en vivres, elle s’en remet à Dieu pour veiller sur leur destin dans ce pays où la guerre et la violence politique restent un sport favori de la classe dirigeante.

Pour autant, tout espoir n’est pas perdu et il n’est pas trop tard de ramener le calme et la quiétude au sein de la population tchadienne qui a trop souffert et pendant longtemps des errements des seigneurs de guerre de tout poils. Pour cela, au nom de la globalisation ou mondialisation et au nom du droit international humanitaire, il est une obligation morale pour la communauté internationale, plus particulièrement la France, les Etats Unis et l’Union Africaine d’exiger aux belligérants de faire la paix des braves. Car en dehors du consensus et du compromis, si le pire n’est pas à souhaiter, il devient de plus en plus impossible de l’éviter lorsqu’on constate que les bruits de bottes se font davantage entendre de partout sur l’ensemble du territoire national.

Abba Ngolo Moustapha
LE TEMPS N° 477 du 3 au 9 mai 2006


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