Le cynisme de Paris – LE TEMPS N° 477 du 3 au 9 mai 2006
A peine les derniers bureaux de vote fermaient, le ministère français des Affaires Etrangères se prononçait pour l’ouverture d’un dialogue politique au Tchad. On voyait venir la manoeuvre. Faire élire Idriss Déby Itno par tous les moyens même s’il faut au passage tuer certains Tchadiens comme ça a été le cas le 13 avril dernier puis demander l’ouverture d’un dialogue politique qui doit conforter lDl, auréolé d’une » nouvelle légitimité « .
On a l’impression avec cette prise de position française que tous les maux du Tchad ont pour nom la France. On a surtout comme impression que dans son histoire, la France a simplement utilisé les Tchadiens comme des simples chairs à canon pour se débarrasser des Nazis allemands qui les ont chassé de leur pays.
On se rend à l’évidence que pour la France, le Tchad n’existe pas. C’est simplement un no man`s land qu’elle doit confier chaque fois à quelques obligés qui lui garantissent ses intérêts. La France a mis tout son poids pour sauver un Habyarimana vomi par son peuple mais la détermination du FPR a eu raison d’elle. Aujourd’hui le divorce entre le Rwanda et la France est un fait… malheureux.
II est temps que la France puisse rectifier le tir puisqu’un fort sentiment anti-français se développe au sein de la population tchadienne. II est vrai que la France dispose d’un millier d’hommes prêt à tout pour protéger ses ressortissants, mais cela ne suffirait pas pour protéger l’ensemble des Français contre la furie des Tchadiens qui risque de déchaîner un jour contre eux.
Tchadiens et Français avons, dans le sang, écrit notre histoire. Autant les Français vivent aujourd’hui dans un pays apaisé et agréable, autant les Tchadiens aspirent à la même chose. Ce dialogue que prêche aujourd’hui la France est simplement de la mauvaise comédie. De quelle légitimité dispose IDI pour qu’un dialogue s’engage avec lui ? Les barbouzes de la DGSE se sont baladés dans la ville le 3 mai dernier, et ont pris le pouls réel du pays. Doit-on discuter avec IDl président pour une légitimité ante ou post3 mai?
Le dialogue prôné par Paris arrive trop tard. II est même une insulte pour ces mères à qui la guerre a arraché des enfants, pour ces enfants rendus orphelins par la faute de la France. La solution ? Revenir au statu quo ante. Le 3 mai, il n’y a pas eu d’élections. Cela n’existe que dans la tête de ceux-là qui refusent de voir la réalité en face, toujours prompts à botter le ballon en touche.
La Rédaction
LE TEMPS N° 477 du 3 au 9 mai 2006