Le PM prêche dans le désert – Le Temps N°496 du 25 au 31 octobre 2006

C’est après 16 ans de règne que les tenants du pou­voir se rendent compte de leur mauvaise gestion des compétences. Au cours du conseil des minis­tres du 19 octobre dernier, le Premier des ministres avait dénoncé les no­minations fantaisistes qui ont cours au pays de Toumaï. Pour le chef du Gouvernement, désormais toutes les nominations aux hautes fonctions de l’Etat doivent faire l’objet d’une discussion au conseil des ministres. Les ministres souhaitant faire les promotions au niveau de leurs départements doivent présenter 4 noms suivis de leur curriculum vitae et quitte au con­seil d’opérer le bon choix.

La question qui taraude dans les esprits des citoyens est de savoir pourquoi avoir attendu longtemps avant de se ré­veiller. Pour certains, l’agneau Pascal qui ne dispose d’aucune marge de manœuvre est entrain de distraire l’opinion. Où était-il lorsque le neveu du président de la République en sa qualité de Ministre des Finances avait procédé à la nomination de tous ses parents et courtisans qui venaient à peine de finir à l’ENAM ou encore ceux qui sont sur les bancs des petits instituts de formation professionnelle qui poussent comme des champignons dans les quartiers de N’Djaména aux postes de direction des affaires admi­nistratives, matérielles et financières dans les différents ministères. Mal­gré le tollé que cela a provoqué, ces promus ont pris fonction et continuent de gérer les ressources des ministères sans être inquiétés parce qu’ils appar­tiennent au clan.

Tous les cadres compétents ont été marginalisés au point où certains sont obligés de vendre leur âme au diable en prenant la carte du parti de Bamina pour se tailler une petite place au soleil. Ceux qui refusent de se prêter à ce jeu, eux, ne sont jamais responsabilisés.

Cette stratégie du régime MPS a pratiquement tué les compétences au détriment des médiocres. Ce qui fait que le rendement n’est pas à la hauteur des attentes de la population. En jetant un regard dans les cabinets ministé­riels, le constat est effarent. Outre le ministre, tout le staff est composé des margoulins issus de son clan et du parti. Certains savent à peine lire et écrire.

Dans les commandements territoriaux, il suffit d’avoir la carte du Mou­vement patriotique du salut et montrer son zèle de militantisme pour se voir nommer gouverneur, préfet ou secrétaire général de la région. Sous d’autres cieux, si l’on n’est pas formé dans une école nationale d’adminis­tration, on ne peut pas accéder à ces postes de responsabilité.

Au Tchad, ceux qui occupent les postes de responsabilité sont parfois des délateurs, des flagorneurs, des traîtres et autres vampires de tout acabit. Ce n’est pas un nègre de service comme l’agneau Pascal qui nous démentira et qui va mettre un terme à cette pratique érigée en système de Gouverne­ment.

« A voir dans son cabinet, lui aussi, il a placé beaucoup de ses parents à la mangeoire», soupire un observateur pointu de la scène politique tcha­dienne. Le peuple tchadien n’est pas dupe de cette communication qui ressemble à une opération de charme en direction d’on ne sait qui? Pour les habitués c’est un véritable coup de bluff destiné à masquer le clanisme et le tribalisme entretenu par le régime de Déby dans la promotion des cadres.

Au sein de l’armée, le fossé est grand entre le nord et le sud. Tous les hors la loi qui ont prêté main forte à Déby pour renverser le régime dicta­torial de Hissein Habré sont tous devenus des généraux de division avec les effets financiers que cela emporte. Allez y comprendre quelque chose.

S’il y a un régime connu pour son clanisme et favoritisme c’est bien le régime du président de la République Idriss Déby Itno. Pire, la majorité des régies financières sont tenues par des jeunes inexpérimentés dont le seul profil est l’appartenance au clan au pouvoir.

Dans les ambassades, on remarque la même pratique, chaque ministre des affaires étrangères qui arrive place ses protégés dans toutes les repré­sentations diplomatiques au détriment des plénipotentiaires chevronnés qui eux ne savent quoi faire et ne font qu’arpenter les couloirs de l’impo­sant immeuble servant de bureau politique du parti unique de l’ancien pré­sident Tombalbaye.

Les Tchadiens ne croient pas du tout à une telle décision parce qu’il n y a pas longtemps le ministre des Finances, du Plan et de l’Economie contre toute attente a récidivé en procédant à la nomination de tous ses parents encore dans toutes les circonscriptions des douanes du pays. Parmi les pro­mus on retrouve l’assassin de l’homme d’affaires syro-libanais. Avec le pré­sident Déby, rien ne marchera dans ce bled.

Ngonka Wague
Le Temps N°496 du 25 au 31 octobre 2006


Commentaires sur facebook