Nous voulons du bon pain! – L’Observateur N° 380 du 14 juin 2006
Tel est l’appel lancé par les responsables des différents ministères et institutions (Commerce, Santé, Chambre de Commerce) pour relever le défi d’une alimentation de qualité au Tchad. Ici, il s’agit du pain. Placé sous le haut patronage du Secrétaire Général du ministère du commerce et de l’artisanat, cette journée d’information et de sensibilisation des boulangers sur la qualité du pain et le respect de la réglementation en la matière en vigueur, a permis aux participants qui sont également venus du ministère de la Santé, de la mairie de N’Djaména, de l’Association des Consommateurs du Tchad (ADC) de passer en revue les problèmes liés à la qualité, au prix et aux conditions de fabrication du pain à N’Djaména.
Le Directeur Général de la Chambre de Commerce M. Bekoutou Taïngam a fait signifier aux boulangers présents dans la salle que « le pain est notre boule quotidienne, donc parler de sa qualité revient au respect de l’alimentation ». Par le passé déjà, et soucieux de la santé du consommateur et de la garantie du produit de consommation, le Ministère du Commerce avait attiré l’attention des boulangers sur le pain et surtout sur le risque que courent les consommateurs.
C’est ainsi qu’en 2004, et par un arrêté N°002/MCIA/SG/DC/2004 relatif à la publicité du pain, de viennoiserie et de pâtisserie fraîche, il a été procédé à un contrôle général de toutes les boulangeries, puis d’autres contrôles s’en sont suivis. Mais malgré tout cela, la qualité du pain demeure douteuse. Pourtant, c’est un produit de consommation quotidienne. Le pain fabriqué au Tchad mis à part celui de Moundou ne respecte pas les normes définies par le ministère de la santé. Le représentant du ministère de la Santé Publique M. Idriss Soumaïne du Centre nutritionnel des technologies alimentaires (CNTA) a intervenu sur la fabrication du pain. Pour lui, la matière 1ère qui entre dans la fabrication du pain n’est pas respectée; il s’insurge sur le fait que parfois les boulangers tchadiens utilisent d’autres farines non homologuées. Ce qui fait gonfler rapidement la pâte. « En Europe par exemple, avant le four, le pain pèse 900 grammes, à la sortie du four, il reste 700g. Pourquoi ne pas suivre cet exemple! Nous voulons du bon pain » a souligné Idriss Soumaïne qui ajoute que les boulangers utilisent quelquefois des levures chimiques au lieu des levures organiques destinées à la fabrication du pain. Pourtant tout ce qui est chimique est nuisible pour la santé. Et pourquoi cette levure? Puisque la farine n’est pas de bonne qualité, il faut utiliser cette levure pour sa levée rapide.
L’autre aspect du problème et non des moindres est que les producteurs ne respectent aucune norme d’hygiène, surtout corporelle. Il faut que ceux qui travaillent dans les boulangeries soient propres: en bien se lavant, prenant soin de leurs tenues de travail etc. Selon lui, il faut qu’il y ait un technicien spécialisé dans chaque boulangerie pour assurer le minimum de sécurité alimentaire. Le Secrétaire Général du ministère du Commerce et de l’artisanat M. Atidjani Abderamane Nourene a quant à lui, insisté sur le non respect de la réglementation en vigueur. Une note circulaire du ministère du Commerce a attiré l’attention des boulangers sur le fait que le pain produit à N’Djaména comporte un produit nocif à la santé; et bien que le ministère leur a demandé de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour que la santé du consommateur soit assurée, ces règles sont souvent foulées au pied. L’on se demande si le respect de ces normes ne va-t-il pas également dans l’intérêt des producteurs qui sont en même temps consommateurs! Même son de cloche du côté du Directeur du Commerce qui a ajouté que le pain n’a pas de prix au Tchad. Car aucune affiche n’est observée quelque pan pour fixer le prix du pain.
Les boulangers ne connaissent même pas le poids de leur pain. Et d’ajouter que le pain fabriqué à N’Djaména ne contient pas de sel iodé, chose pourtant recommandée par le Ministère de la Santé. Certains N’djaménois vont jusqu’à Kousséri au Cameroun chercher du pain; C’est ce qui est inquiétant surtout que l’économie d’un pays se repose avant tout sur les entreprises nationales et celles de grande consommation. Pour le Directeur Général de la Chambre de commerce, avec la mondialisation, nos boulangers oublient qu’ils sont en contact direct avec le monde extérieur sensé bien connaître la chose. Donc, il suffit qu’un boulanger arrive d’ailleurs et améliore la qualité du travail pour qu’il leur rafle tout. Et ceci est très grave pour l’économie du pays. Souhaitons que toutes ces paroles ne soient pas tombées dans les oreilles d’un sourd et que cela puisse permettre à nos boulangers d’améliorer la qualité de leur production dans l’intérêt de tous.
Mborou Talo
L’Observateur N° 380 du 14 juin 2006