Il faut aller plus loin qu’une unité verbale et même discuter de l’après Deby
Il ya un an, dans un article publié sur les sites tchadiens intitulés Vers une marche victorieuse de la résistance!!, Le Gars de Mandoul, d’une grande vision, réclamait déjà ce qui se présente aujourd’hui comme une nouveauté chez les rebelles : l’unité et la coordination militaire de toutes les forces. Je vous reprends un extrait de l’article :
« A cette étape de la marche de la résistance, une unité de vue et de jugement portées à un haut degré de tous les dirigeants des différents organes s’imposent… Une résistance victorieuse a impérativement besoin d’une convergence d’objectifs politiques de tous ses membres…Ce qui renforcera les capacités de la résistance, c’est une véritable recomposition de l’unité politique des différents mouvements qui nécessitera toute une série d’expériences nouvelles et communes en rupture avec les logiques claniques…L’actuelle configuration des forces de la résistance est efficace dans une perspective de victoire…La résistance doit s’affranchir des règles de la guerre classique, en s’adaptant au différentiel considérable de puissance existant entre ses propres ressources et celles de Deby Itno. Pour cela, il faudrait davantage coordonner les opérations militaires… C’est une stratégie qui implique le développement d’une grande capacité de rapidité d’action, de la capacité à se disperser et à se concentrer rapidement.»
Dans un autre article où il a été encore plus direct titré La nécessité de l’unité de la résistance!!, Le Gars de Mandoul toujours disait : « Personne ne peut prétendre être capable de déloger seul Deby parce que cet oppresseur du peuple a le soutien de l’armée et de l’administration française. Si la résistance vise réellement la libération du peuple tchadien des forces pseudo-démocratiques alors il lui manque l’élément magique : l’unité de toutes les forces vives de sa dimension militaire! Parfois, l’attitude et la stratégie de certains meneurs des groupes politiques de la résistance m’échappent. Quel seuil d’asservissement devrait-on atteindre pour comprendre que nous devons nous unir pour nous délivrer nous-mêmes de la persécution?»
C’est à croire que c’est maintenant que les rebelles ont retrouvés ces réflexions qui circulaient fort longtemps. L’élément magique qui manquait : l’Unité. Mais la réflexion faite par Le Gars de Mandoul est naïve parce qu’elle ne tient pas compte des réelles motivations des chefs rebelles et des enjeux politiques tchadiens. La mefiance gorane/Zakawa est une réalité. Pour les goranes, Mahamat Nouri a entrainé des milliers de jeunes goranes dans la mort que personne ne le comprendra qu’il combatte Deby pour remettre le pouvoir aux oncles de Deby, comme quelqu’un l’a déjà analysé. Pour les zakawa, personne n’est en mesure de garantir une condition sécuritaire si les goranes revenaient au pouvoir. La vraie équation se résume globalement à ces deux groupes parce qu’ils détiennent le pouvoir des armes et se sont eux seuls qui sont en mesure de menacer réellement le pouvoir de Deby. Ces problèmes rendent simpliste la théorie de l’unité des rebelles présenté par Le Gars de Mandoul bien qu’il faille passer par là pour prétendre venir à bout de Deby fort du soutien français.
Si on voit les choses telles qu’elles ont évolué, on pourrait dire que les rebelles se sont heurtés à plusieurs reprises aux forces de Deby en déplorant des milliers de morts avant de se dire que Le Gars de Mandoul avait raison. Pourtant, il a été dit et discuté par les internautes depuis plus d’un an qu’aucun groupe ne peut vaincre seul Deby. Si l’unité annoncée des groupes rebelles est une réelle volonté alors nous la saluons mais il faut aller plus loin qu’une unité verbale et même discuter de l’après Deby avant de se précipiter à Ndjamena. Autrement, ces groupes vont s’entrer dedans à l’entrée de Ndjamena si Deby venait à traverser le Chari. Dans ce cas de scenario, personne ne veut mourir bêtement à Ndjamena parce que des hommes armés se contestent les accords de bandits.
Tchama Teubé
Tchama.teubé@yahoo.fr
