Tchad: l’armée s’apprête à contrer une colonne rebelle à 300 Km de N’Djamena – Afp
Menée par le président Idriss Deby, l’armée tchadienne est partie à la rencontre d’une importante colonne rebelle, qui après une avancée éclair se trouvait jeudi à 300 km de N’Djamena, au moment où devait être donné le coup d’envoi à une force européenne dans la région.
Issus d’une alliance formée en décembre par les trois principaux groupes armés tchadiens, dirigés par Mahamat Nouri, Timan Erdimi et Abdelwahid Aboud Makaye, les rebelles sont entrés au Tchad lundi depuis le Soudan, où ils avaient établi leurs bases.
Depuis, ils ont progressé sur 500 km évitant l’armée et l’affrontement direct.
Selon des sources rebelles et militaires, l’aviation tchadienne a frappé à plusieurs reprises cette colonne, composée d’environ 300 camionnettes de type « pick-up », pouvant transporter dix à quinze hommes chacune.
« C’est une grosse force« , a déclaré à l’AFP une source militaire à N’Djamena, précisant qu’elle s’était stabilisée jeudi aux environs du lac Fitri, à 300 km à l’est de la capitale.
« Nous attendons la confrontation« , a affirmé à l’AFP le porte-parole de l’alliance rebelle Abderaman Koulamallah.
Depuis mercredi, de nombreux pick-up de l’armée nationale tchadienne (ANT) ont quitté N’Djamena vers l’est, a constaté un journaliste de l’AFP.
« Le président Deby est lui-même parti au front ce (jeudi) matin à l’aube, et on s’attend à ce que l’armée aille au contact aujourd’hui« , a expliqué un haut gradé.
Chef militaire, le président Deby participe parfois en première ligne aux combats face aux rebelles, comme fin novembre 2007 lors d’affrontements dans l’est du Tchad qui ont fait plusieurs centaines de morts.
Selon des sources militaires, les forces de l’armée envoyées au front représentent le double des rebelles, et d’autres éléments ont quitté Abéché, principale ville de l’est du pays, pour prendre les assaillants « en tenaille« .
Il s’agit de la plus importante avancée rebelle vers N’Djamena depuis avril 2006, quand une colonne avait été repoussée aux portes de la ville.
Dans la capitale, survolée par des hélicoptères, la vie ne semblait pour autant pas affectée jeudi. Par « précaution », le lycée français est resté fermé, et l’ambassade de France a appelé ses 1.500 ressortissants au Tchad à limiter leurs déplacements.
Présente au Tchad avec le dispositif Epervier, l’armée française continue de mener, comme par le passé, des missions de reconnaissance aérienne, et à fournir des renseignements aux autorités.
La France a indiqué à la mi-journée suivre « avec beaucoup d’attention » la situation au Tchad.
Dans la nuit de mercredi à jeudi, le gouvernement a confirmé l’avancée rebelle, mais a assuré contrôler la situation.
« Le Tchad s’attendait à une action de leur part, nous y étions préparés« , a expliqué un conseiller de M. Deby.
Jusque-là incapables de s’unir, notamment en raison de leur appartenance à des ethnies antagonistes, les groupes armés se sont alliés à la mi-décembre sous la pression, d’après N’Djamena et des observateurs étrangers, du Soudan voisin.
Comme par le passé, N’Djamena a accusé Khartoum d’avoir équipé les rebelles, affaiblis par les combats de la fin 2007, et d’être à l’origine de cette attaque.
« Il y a une fenêtre de tir avant le déploiement effectif de la force européenne, qui risque de figer les positions sur le terrain et dont les Soudanais ne veulent pas« , estime un observateur étranger.
L’offensive coïncide avec le lancement de la force européenne (Eufor) de 3.700 hommes, dont 2.100 Français, chargée de protéger dans l’est du Tchad et le nord-est de la Centrafrique les réfugiés soudanais du Darfour voisin ainsi que les déplacés internes tchadiens et centrafricains, soit 450.000 personnes.
L’Eufor, qui va se déployer jusqu’à la mi-mai, n’a pas mandat pour s’interposer entre les rebelles et l’armée. Son commandant sur le terrain, le général français Jean-Philippe Ganascia, doit donner jeudi le coup d’envoi local à l’opération.