Les Brèves de N’Djaména – La grande muette rechigne (Suite)
La rencontre entre les officiers supérieurs et Deby est un évènement, et elle est même l’évènement, pourrait- on le dire sans exagération, tant elle semblait impossible ou impensable il n’y a pas si longtemps. Les forces et les atouts de Deby sont incarnés par l’armée et les caisses de l’Etat. C’est avec l’armée qu’il réprime toute velléité de protestation, de révolte ou de rébellion. C’est encore avec l’armée qu’il a contracté pour son pouvoir une assurance vie en la mettant à la disposition de qui il veut. L’armée est l’ossature du régime, son épine dorsale. Et par la même occasion, Deby tient l’armée en la fragmentant, en la tribalisant et en la clochardisant tout en maintenant dans l’opulence quelques têtes ciblées. L’armée tchadienne, c’est le règne de l’injustice dans son expression la plus hideuse et la plus aberrante ; ce sont le recrutement, les promotions et l’octroi des grades, de manière injustifiée, clanique. Dans ce corps, il y a deux clans : il y a d’un côté la grande muette dans son expression classique et qui est le parent pauvre de l’ossature, et de l’autre la DGSSIE. Cette dernière est une véritable armée dans l’armée, la garde prétorienne, composée essentiellement des membres du clan du monarque.
Par un système de concussion, de corruption, d’intimidation et des menaces, Deby tient son armée. Un officier qui a osé regardé Deby droit dans les yeux, se verra rétrogradé ou demis de ses fonctions, mis à la diète sèche ou radié de l’armée. La peur de la galère pousse tous les officiers à être accommodants, à baisser la tête, à être des béni-oui-oui.
Deby a laissé entendre « qu’il préfère voir partir en rébellion 20 véhicules avec armes et bagage que d’avoir une petite manifestation dans les rues de N’Djamena » Mais on sait aussi que, tout en tenant d’une main de fer son armée, il a une peur bleue de cette même armée ; c’est pourquoi il a fait de l’armée l’institution la plus désorganisée, la plus mal gérée et où règne une injustice criarde ; à dessein bien sûr ! Mais malgré cela, il y a eu cette rencontre suivie d’une mise en garde de la grande muette ; c’est un évènement qui signifie que les lignes sont en train de bouger et le réveil cède à la peur. Ces officiers made by Deby ont suffisamment amassé de biens, ils ont de belles villas, de nombreuses épouses et beaucoup d’autres biens. Pourquoi aller bêtement mourir pour les plaisirs de Deby. Le ras-le-bol est généralisé, le roi est-il désormais nu ?
Beremadji Félix
N’djaména – Tchad