Le dilemme du déplacement : un examen des problèmes et des préoccupations des personnes déplacées dans l’est du Tchad – Relief
« Nous voulons retourner à notre village, mais nous ne pouvons pas retourner à la violence ; nous ne pourrons retourner que si les hommes armés partent »
Depuis le début des importants déplacements internes de population dans l’est du Tchad en 2005, le gouvernement, les agences de l’ONU et de nombreuses organisations humanitaires ont manifesté leurs préoccupations sur le fait que l’aide humanitaire pourrait créer une culture de dépendance ou provoquer des déplacements chez les Tchadiens non affectés par la situation. En conséquence, les camps de personnes déplacées n’ont initialement pas été mis en place. Les Tchadiens fuyant les attaques et la violence ont ainsi dû se débrouiller et trouver refuge dans les communautés avoisinantes qui, malgré leurs propres difficultés, ont accueilli les populations déplacées du mieux qu’elles le pouvaient.
En l’absence d’amélioration de la situation sécuritaire, peu de personnes déplacées retournèrent à leurs villages d’origine. En 2007, de nouveaux déplacements eurent lieu, ce qui accrût le nombre total de personnes déplacées à plus de 155 000, sollicitant au maximum les mécanismes d’adaptation des communautés et l’aide limitée fournie par les ONG. La situation fut qualifiée de catastrophe humanitaire (1) dans les mois qui suivirent et un effort humanitaire à grande échelle fut lancé par l’ONU et les ONG. La communauté internationale, sous mandat des Nations unies (résolution 1778), décida de déployer une force multidimensionnelle, composée de la MINURCAT (2), et l’EUFOR Tchad/RCA (3) pour assurer à court terme la protection des camps de réfugiés, des sites de personnes déplacées et de l’aide humanitaire. Cette force fut également déployée afin d’aider le gouvernement tchadien à rétablir la sécurité et retrouver le contrôle administratif et judiciaire sur les zones en litige en vue de stabiliser le pays et de faciliter le retour des personnes déplacées.
L’aide aux personnes déplacées et les politiques de retour demeurent des questions controversées dans l’est du Tchad. Un certain nombre de visions s’affrontent et cherchent à déterminer les mesures à prendre afin d’aider les personnes déplacées à trouver des solutions à long terme pour leurs familles.
Les grands absents de ces débats ont toutefois été les commentateurs les plus importants et les plus avertis : les personnes déplacées ellesmêmes. Afin de remédier à cette omission, CARE a entrepris au printemps 2008 une étude systématique auprès de 315 ménages déplacés et a mené une série d’entretiens avec des groupes de bénéficiaires. En communiquant les résultats de cette étude dans ce document, nous espérons faire en sorte que les voix des personnes déplacées soient entendues, leurs problèmes pris en compte et leur place à la table de discussion des politiques assurée.
Notes
(1) Rapport sur la situation no. 1, année fiscale 2008, « Chad Complex Emergency », avril 2008, USAID.
(2) Mission des Nations Unies en République Centrafricaine et au Tchad
(3) Force de l’Union européenne au Tchad et en République Centrafricaine