Les Brèves de N’djaména : C’est la peste, il faut l’éviter
C’est le mot d’ordre des cadres civiles et militaires des régions visitées par Deby. En effet ces cadres redoutent comme la peste tout contact avec le Roi Deby. Normalement, quand un chef d’Etat fait un déplacement à l’intérieur du pays, c’est l’occasion des grandes réjouissances, récompenses, reconnaissance, etc. Or avec Deby c’est tout le contraire : ses déplacements servent d’occasion de sanctions, de remontrances.
Il prend un très grand plaisir de révoquer, après une humiliation publique, tel responsable militaire ou civile. On dirait même que ces déplacements n’ont pas d’autres objectifs que cela. Le roi ne s’occupe pas, ni ne se préoccupe de l’état des lieux visités, ni la situation des populations, moins encore l’état de l’administration locale. « Celui- là qui l’a nommé ici ?, Celui- là est ici depuis quand ? Untel, qu’est-ce qu’il fait ici ? J’avais déjà longtemps demandé à tel Ministre de remplacer celui-là, etc. » Et les sanctions tombent comme des feuilles mortes, sous les applaudissements des bouffons ; ce qui fait que dès que l’annonce de l’arrivée du Roi dans tel coin est faite, tous les cadres civiles et militaires s’éparpillent comme un troupeau de moutons à la vue d’une hyène : celui-ci est en congé, celui-là a évacué sa famille malade vers N’djaména, tel autre est en mission, etc. Bref, l’essentiel est de ne pas se faire voir ou remarquer.
Les bouffons, très aux fins des manières de leur Chef en profitent largement et intelligemment pour faire nommer les leurs à des postes laissés vacants par les victimes du courroux de Deby. Quand le déplacement du Chef est connu, les bouffons demandent à tel ou tel individu en quête de responsabilité de prendre les devant et accueillir le chef sur place. Ce protégé des bouffons ira avant les autres, se présentera comme envoyé par ses protégés pour préparer l’arrivée du Chef. Les responsables locaux s’agenouillent devant le bouffon des bouffons. A l’arrivée du Chef, il fera preuve d’untel zèle dans le protocole que, quand un responsable local est révoqué séance tenante, il suffit au mentor de sous-bouffon de glisser perfidement son nom au grand Chef, et hop, le voila nommer à un poste de responsabilité. Il n’y aura pas de décret car la parole du Chef suffit largement.
D’ailleurs, aux prochaines nominations, le Monsieur ainsi glissé ne sera pas confirmé. C’est un autre qui sera nommé à la place, car Deby a, entre temps, oublié qu’il avait déjà nommé quelqu’un, oralement, à ce poste. C’est l’administration tchadienne du 21ème siècle sous Deby.
Les sujets d’inquiétudes pour Deby – Selon ses proches, malgré les apparences, Deby est très inquiet de son avenir. Les sujets de préoccupation ne manquent pas. Les désertions au profit des différents groupes ont repris de plus belle, le groupe d’Issakha Diar est en voie d’effritement, déjà à la date du 16 sept. 2008, 8 véhicules et plus d’une cinquantaine d’éléments ont regagné le RFC sans compter les éléments de l’ANT qui rejoignent les différents groupes. Les désertions sont aussi nombreuses chez l’allié MJE : le 15 septembre, 3 vehicules ont rallié le gouvernement soudanais, le 16 sept. 2008 ce sont 14 vehicules qui ont rallié, ajouté à cela le conflit ouvert entre le patron du MJE (dont l’état de santé fait l’objet de diverses spéculations) et son Chef militaire. Mais le grand sujet de préoccupation pour Deby est la réunion des chefs des groupes armés.
Il ne cesse de répéter que si « ces gens s’unissent, ce sera très difficile pour nous » et de faire campagne sur le thème « si vous ne vous battez, c’est tant pis pour vous, car s’ils (les rebelles) viennent, ils ne vous feront aucun cadeau, mais moi ils ne me trouveront pas » ! Deby attend avec beaucoup de préoccupation la fin du mois de ramadan. Selon les mêmes sources, Deby a abordé par téléphone à deux reprises avec un correspondant non identifié la possibilité d’une élimination physique de Timan et Nouri.
Enfin, autre sujet de préoccupation pour Deby, et celui-ci est de taille : la mort d’Ibni. Quand il était paniqué, désemparé, Deby a assassiné Ibni ; plusieurs sources concordantes disent d’ailleurs qu’il s’était personnellement acharné sur Ibni. Maintenant, ayant repris ses esprits, il se rend compte de la mesure du drame et ne fait que répéter « cette affaire d’Ibni va nous conduire loin ». Deby est convaincu que la France et l’UE ne resteront pas les bras croisés. Malgré le calme apparent, il y aura des sanctions, il en est sûr mais ignore l’étendue et la gravité et il attend avec inquiétude leur annonce.
Le Gouverneur de Bongor, mis fin à ses fonctions – Chez Deby le ridicule ne tue. Le renvoie de Mahamat Nimir Hamata a été annoncé par Tchadactuel avant la publication du décret signé, au moment euphorique de la chasse aux arabes. Dès que Tchadactuel a fait cas, Deby a mis en attende le décret, jusqu’à ce jour du 15 sept. 2008.
Beremadji Félix
N’djaména