Les Brèves de N’djaména : Deby et El Béchir agacent les différents intermédiaires

En fin de l’année 2010, les deux nouveaux compères (Deby et Elbechir) nous ont fait vivre des situations, diplomatiquement parlant, tragi-comiques. Pour situer le problème un petit rappel de la situation et du rôle de Qatar dans le conflit de Darfour.

Le petit émirat par sa superficie et grand Emirat par sa politique, s’occupe du dossier de Darfour depuis 2008. Le médiateur de l’Onu et de l’Union Africaine a élu domicile à Doha. Le gouvernement qatari a fait venir de tous les horizons plus de 400 personnes (militaires, personnes ressources, déplacés, réfugiés, opposant Internet, opposants thureya, etc.) logés et nourris en sus de per diem. Tous ces efforts ont pour but de trouver une issue honorable pour toutes les parties, pour une paix définitive et globale au Darfour.

Il y a beaucoup des intérêts dans ce dossier : les libyens ont fabriqué une opposition à leur image, c’est le groupe de Tripoli ; l’envoyé spécial américain, le général retraité Scott Granshon en a fabriqué une , c’est le groupe d’ Addis et enfin le gouvernement soudanais n’est pas du reste , c’est le groupe des indépendants. Tout ce beau monde se trouve à Doha depuis deux ans aux frais de l’Emirat qui ne lésine sur aucun moyen politique, diplomatique, et surtout financier. Malheureusement ces efforts sont restés vains d’autant plus que les deux principaux acteurs du conflits à savoir le For Abdel-wahid Mohamed Nour et le Zaghawa Dr Khalil Ibrahim, refusent de participer aux négociations aux côtés de ces créatures ex-nihilo.

Le gouvernement qatari et le médiateur de l’Onu- Union Africaine ont déployé d’énormes efforts pour faire venir à la table de négociation la délégation de JEM, en même temps ils ont décidé de faire un tour sur le terrain pour constater de visu la réalité de la situation. C’est ainsi qu’une forte délégation qatari et ONU/OUA s’est rendue pendant une semaine dans les trois wilayas de Darfour où elle a rencontré toutes les sensibilités locales (chef des cantons, chef des tribus, déplacés, cadres de la région . . . ) . Ensuite la délégation s’est rendue à l’est du Tchad, à abéché précisément, où elle a rencontré les représentants de tous les camps des réfugiés.

La délégation est rentrée avec une idée claire et précise : il n’ y a pas de paix sans Abdel-wahid qui tient les camps des déplacés et des réfugies, et de Dr Khalil qui a une armée opérant en territoire soudanais ! C’est à ce moment précis que choisit le Président Elbechir obnubilé par un accueil populaire à Nyala pour donner un ultimatum de 24h aux qataris pour la fin des négociations dans le cas contraire il retirera sa délégation et les pourparlers se feront sur place au Soudan entre frères sans intervention des intrus (sic) , montrant ainsi au grand jour sa mauvaise volonté de faire des vraies négociations avec des vrais partenaires . Effectivement la délégation soudanaise plie bagage le 31 decembre 2010! Ce fut une onde de choc auprès de tous les protagonistes du dossier –Onu, Union Africaine, Ligue Arabe. . . . – qui ont toujours soutenu le « forum de Qatar ».

Les qataris, très flegmatiques décident de donner une leçon aux soudanais en convoquant illico les membres du Conseil de Sécurité, l’Union Africaine, la ligue Arabe et les pays voisins du Soudan pour faire adopter un document cadre de règlement du conflit au Darfour ; en d’autres termes si ce document est adopté par ces instances, il sera exécutoire et sera imposé aux soudanais.
Ayant vu venir le coup des qataris, Elbechir envoie en catastrophe un émissaire pour s’excuser et fait revenir la délégation à Doha dans moins d’une semaine après son départ !

Sur le dossier Tchad, les qataris ont accueilli les leaders de l’UFR en juillet 2010 à la demande des soudanais qui les ont fait savoir qu’une délégation du gouvernement tchadien sera là pour mener des négociations. Depuis lors les qataris attendent l’arrivée d’une délégation de N’djaména. Le secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères qataris a rencontré plusieurs reprises Mrs Deby et son Ministre des Affaires Etrangères, Moussa Faki. Toujours rien sinon des vagues promesses, Jusqu’à fin 2010 où le Secrétaire d’Etat qatarie, accompagné du Médiateur Commun se rend à N’djaména dans le cadre de prise des contacts avec les réfugiés du Darfour. Pendant l’audience avec Deby, le qataris pose clairement le problème des opposants tchadiens à Doha. Alors prenant son courage à deux mains, Deby explique clairement aux qataris médusé qu’il ne souhaite pas le retour de ces opposants, parce que, dit-il, le Tchad est un pays complexe , tribalisé où la vengeance est une règle ancestrale entre les tribus et ethnies. Ainsi donc le retour des ces gens créera une situation ingérable pour lui et pour le pays. Il ne souhaite pas faire la paix avec eux, en conséquence ils ne sont pas les bienvenus au Tchad (sic). Voilà c’est clair et net. Les qataries ont bien pris bonne note et ont fait passer le message aux intéressés. Une page est tournée. Non, ce n’est pas fini !

Mr Faki débarque le 6 janvier 2011 pour assister à la réunion convoquée par les qataries dans le cadre du conflit du Darfour en tant que représentant du pays voisin du Soudan. Après la réunion Moussa Faki informe le Ministre qatari qu’il a un message de Deby, alors le Ministre le reçoit et Mr Faki lui dit tout simplement que le Président Deby demande aux qataris d’éloigner de Doha les leaders de l’UFR !!

Les qataris qui sont connus dans la région pour leurs bonnes manières ont failli s’étrangler. Mais de quoi se mêlent ces tchadiens et leur Président ? Prennent-ils Qatar comme la R.C.A, Togo ou encore le Bénin! Non contents de faire traîner les qataris qui ont tant souhaité la venue d’une délégation tchadienne, et ce, avec mépris pendant 6 mois, les tchadiens ont le culot de donner des ordres aux qataris pour les affaires intérieures. Les qataris sont très mécontents pour deux raisons : d’abord ils pensent que Deby n’a pas été élégant à leur égard ; à la rigueur il aurait dû envoyer, ne serait ce que symboliquement une délégation pour faire un semblant de négociations, deuxièmement ils n’ont pas à intervenir pour le maintien ou le renvoi des opposants tchadiens, dès lors que le Qatar est considéré par beaucoup des observateurs un pays de paix et un pays d’accueil de plusieurs opposants des différents pays.

Ce qui est étonnant dans tout ce charivari debyen, c’est l’attitude du Ministre des Affaires Etrangères du Tchad qui rapporte texto les niaiseries de son chef sans aucune dose diplomatique. Un collaborateur est un bouclier ; comment un Ministre des Affaires Etrangères peut se permettre de porter des messages incongrus et affligeants aux dirigeants d’un pays qu’il vient de connaître à peine !

C’est çà le Tchad où le collaborateur est un dongourou ou même un perroquet qui répète mécaniquement la parole du chef, au lieu de le persuader que ces genres de messages ne sont pas diplomatiques et à la limite offensants.

Mahamat Ahmat
N’djaména – Tchad


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