Les Brèves de N’djaména : L’armée soudanaise au Tchad

Idriss DEBY est inquiet, très inquiet. L’arrivée en fanfare du leader du MJE est perçue par Mr Deby comme une menace directe pour son régime. Certes, il n’a pas totalement tort, il y a des signes avant-coureurs qui présagent un mauvais avenir : les relations exécrables avec le principal tuteur et accessoirement avec le Président OBAMA qui est l’un des principaux soutiens du printemps arabe ; la révolte ouverte de Timan Deby et enfin le fourmillement des éléments de l’UFR de part et d’autre de la frontière.

En effet, Deby a fait convoqué par les généraux oisifs les ex-RFC qu’ils les a déculottés à Moussoro à l’été dernier, mais comme a déjà indiqué un des confrères, à peine une quarantaine s’est trouvée à Amdjeress, le reste est en concertation permanente avec les autres éléments de l’UFR qui errent entre Adré et Guéréda. D’ailleurs entre Deby et ceux qui ont répondu à son appel il y a un jeu où tous les protagonistes connaissent réciproquement les intentions des uns et des autres, c’est pourquoi Deby hésite à tenir ses engagements.

Devant tous ces charivaris, Deby vient de franchir un nouveau pas : une délégation de haut niveau est dépêchée à Khartoum hier le 27/09/11, porteuse d’un message à caractère hautement confidentiel et urgent. Mr Deby propose tout bonnement à Al-Béchir le déploiement de l’armée soudanaise en territoire tchadien pour prendre, selon les fuites, par le revers le MJE! Traduisez : Deby demande le parapluie soudanais pour se maintenir au pouvoir! Ces unités doivent se positionner à Adré, Guéréda, Iriba et Bahaï.

C’est une situation inouïe, inattendu, à la limite démentielle. Pourquoi Deby a perdu totalement confiance à son armée ? Certes on savait que l’armée tchadienne n’a jamais constitué une ossature nationale, c’est une armée tribale voire clanique composée des supplétifs à tout venant. Après avoir marginalisé et clochardisé tout un pan de la société, Deby récolte l’effet de boomerang, en d’autres termes Deby aiguise son armée clanique contre le même clan, une fois avec Timan Erdimi, 2ème fois avec Timan Deby et de 3ème fois avec Dr Khalil, avec qui Deby a vainement tenté une réconciliation par l’intermédiaire du Burkina, ça fait trop ! Ce type se comporte comme un chameau en rut, il ne mord que les plus proches. Le résultat ? Le clan s’est dichotomisé, la clanique s’est démobilisée et les supplétifs regardent en spectateurs.

Prendre le MJE par revers, suppose que ce mouvement a ses arrière-bases au TCHAD et qu’il peut à tout moment menacer par sa présence indésirable sur le territoire tchadien le régime, or selon nos informations le MJE a établi son quartier général à « Djebel Modobb » à plus de 45O km de la frontière tchadienne. Tout en sachant précisément les positions du MJE, les soudanais adoptent une stratégie défensive laissant l’initiative au MJE. Alors, quel sens donner aux propositions de Deby ?

La présence d’une armée étrangère – de surcroît soudanaise- sur aucune base juridique posera inéluctablement des problèmes de souveraineté et son corollaire, l’intégrité nationale.

Par cécité politique et manque de hauteur d’esprit, Deby est en train de dresser le lit de Dr Khalil et faire du Ouaddaï géographique le hinterland du Darfour. Déjà par tradition culturelle et de civilisation, cette région a eu de tout temps les yeux doux vers l’est ; on en ajoute une présence militaire qui sous-entend une circulation sans limites et sans contrôles des biens et des personnes et peut-être demain un Proconsul Général, c.-à-d. un Délégué Général du Gouvernement Soudanais à Abéché.

Il est temps que la conscience collective se réveille, la nation est en danger. L’armée (ou ce qu’il en reste) qui a été toujours le faire valoir de Deby, doit se réveiller pour jouer son vrai rôle, à savoir la défense de la patrie en danger. L’Assemblée Générale (la grande muette) – y compris les décrétés doivent demander des comptes à Deby. Et enfin le peuple tchadien doit réfléchir à : « ta liberté naîtra de ton courage, lève les yeux l’avenir est à toi ».

Beremadji Félix
N’djaména