Am Timan: 48 heures après le règne de l’Ufdd – N’DJAMENA BI-HEBDO N° 988 du 30 octobre au 1er novembre 2006
Contrairement aux propos du ministre de la Communication selon lesquels les rebelles ont évité tout contact avec les forces gouvernementales, il y a eu bel et bien affrontement. C’est ce que nous avons vérifié sur le terrain lors d’une mission de presse le 27 octobre 2006.
Après leur attaque de Goz Bëida le dimanche 22 octobre, les rebelles de l’Union des forces pour la démocratie et le développement de Mahamat Nouri ont attaqué Am Timan le 23 octobre aux environs de 15H. A trois kilomètres de la ville, les éléments de l’Armée nationale tchadienne ont affronté les rebelles qui cherchaient à faire leur entrée dans la ville. Après un combat d’une heure, les rebelles ont pris le dessus. Aussi bien numériquement que matériellement, les rebelles avaient toutes les raisons d’imposer un échec à l’Ant. A bord de quelque 70 véhicules bien équipés en hommes et en armements, selon des sources concordantes, contre 8 véhicules seulement pour les loyalistes, les rebelles ont mis facilement en déroute l’armée.
Selon certains responsables militaires de la région, les rebelles ont bénéficié des complicités au sein de la population militaire et civile dans la ville. « Au moment où nous devions les repousser, quelqu’un leur a vendu la mèche par un coup de téléphone pour leur indiquer que nous n’étions qu’à 8 véhicules. C’est ainsi qu’ils nous ont forcés à replier », a raconté un militaire ayant participé au combat.
Après la déroute des forces gouvernementales, les rebelles ont fait leur entrée dans la ville. Selon des sources concordantes, ils n’ont pas inquiété la population civile. Des édifices publics ont été pillés, saccagés. A la préfecture, les portes sont défoncées, les documents détruits et éparpillés partout dans les bureaux et dans la cour; la résidence du gouverneur a été pillée, les portes brisées par des balles. Chez le commandant de la région militaire, Alifa Weddeye, où sont entreposées les armés et les munitions, les rebelles ont réussi à les emporter entièrement. Le camp (militaire) des mariés également a été pillé. « Au marché par exemple (à un jet de pierres des édifices endommagés, Ndlr), ils n’ont rien touché. Ils ont dit qu’ils n’ont rien contre les civils. Leur cible c’est les militaires », raconte un militaire.
Entrés à Am Timan le lundi 23 octobre dans l’après midi, les rebelles de l’Ufdd ont assuré le contrôle de la ville jusqu’à mercredi matin avant de s’ébranler vers Haraze Mangueigne. Après le combat, les rebelles ont eux mêmes transporté les blessés du côté du gouvernement jusqu’à l’hôpital d’Am Timan, reconnaissent certains blessés rencontrés. « Ce ne sont pas les rebelles qui ont pillé les locaux que vous voyez, c’est la population qui en a profité », a témoigné un Am Timanois.
Où se trouvent actuellement les éléments rebelles? « Ils sont hors d’état de nuire. Certains sont rentrés au Soudan, d’autres sont en débandade et nous sommes derrière eux », répond le ministre de l’Administration du territoire, Ahmat Bâchir, qui a dirigé la délégation. « Nos forces sont là, elles sont alignées sur tout le front. Elles sont en ce moment en train de poursuivre ces bandits « , a-t-il ajouté. De sources gouvernementales, quelque 200 véhicules se sont mis à la poursuite des rebelles qui se dirigeraient tantôt vers le Soudan, tantôt vers la République centrafricaine.
Une trentaine de morts et des blessés côté rebelle, six morts et neuf blessés côté gouvernemental, nous ont annoncé les membres du gouvernement ayant fait partie de la délégation. D’autres sources indiquent de lourdes pertes du côté des forces gouvernementales à cause de la supériorité numérique des éléments de l’Ufdd. Aucun cadavre de rebelle n’a été aperçu lors de la mission. Les rebelles ont emporté leurs blessés tout comme les cadavres des leurs, nous a-t-on fait savoir. En tout cas, les blessés côté gouvernemental ramenés à N’Djaména de la C130 qui a transporté la délégation, atteignent une dizaine. En plus du ministre de l’Administration du territoire, la délégation comprenait entre autres le ministre de la Défense nationale, Bichara Issa Djadallah; le ministre de la Communication, Moussa Doumgor ; la ministre déléguée auprès du ministre de l’Education nationale chargé de l’alphabétisation, Albatoul Zakaria ; le 1er vice-président de l’Assemblée nationale et député d’AmTiman, Assaïd Gamar Sileck ; le conseiller du président de la République. « Les habitants d’Am timan sont également des Tchadiens. S’il se passe quelque chose, le gouvernement ne peut pas rester à N’Djaména pour observer. Nous sommes venus nous enquérir des réalités, rassurer la population que de pareils dégâts ne se reproduisent plus jamais à N’Djamena ou à Am Timan », a expliqué Ahmat Bâchir.
Alladoum Nadingar Envoyé spécial
N’DJAMENA BI-HEBDO N° 988 du 30 octobre au 1er novembre 2006