Les frasques de Brahim Déby Itno à Paris – Le Temps N° 482 du 7 au 13 juin 2006

les frasques Brahim Le fils aîné du président de la République, Brahim Déby Itno, ex-futur héritier de son père à la tête d’un pouvoir que ce dernier voulait désormais dynastique au Tchad, a été arrêté mercredi dernier par la police française à Paris pour bagarre, détention d’arme à poing chargée, de cannabis et cocaïne. Mis en garde à vue puis déféré devant le tribunal de grande instance de Paris, il s’en est sorti avec six mois de prison avec sursis mais avec une image désormais salie au niveau international peu au fait de ses frasques ndjaménoises.

L’histoire commence dans une discothèque (disons boîte de nuit pour les Tchadiens) parisienne dans la nuit du mercredi au jeudi dernier. Le fils du PR, Brahim Déby Itno, à la sortie de cette boîte de nuit, pour des raisons non explicitées mais peut-être suite à des propos peu amènes avec un des gérants du coin, se retrouve au centre d’une bagarre. Dans la mêlée, tombe de son algarade un pistolet chargé. Raison aggravante pour que la police, accourue sur les lieux, l’appréhende pour le coffrer.

Mais avant cela, flairant quelque chose et devinant qu’un pistolet chargé et porté par BRADI (Brahim Déby Itno) peut en cacher d’autres, l’enfant étant de tradition guerrière comme l’aura affirmé son avocat plus tard, elle décide alors de perquisitionner son domicile parisien. Le flair s’avéra juste car là, le pot aux roses est vite découvert mais autrement plus surprenant : au lieu de trouver d’autres armes, c’est plutôt une réserve de stupéfiants qui est découverte. Deux cent cinquante grammes de cannabis plus 50 g de cocaïne, telle est la quantité de drogue saisie.

En France cela est grave et vaut au moins 10 ans de prison ferme pour que la police en reste là parce que le délit porte la marque du fils d’un président africain ami personnel de «Chichi le parrain.» BRADI est alors mis en garde à vue puis déféré le lendemain devant le tribunal de grande instance de Paris. Péché de jeunesse et comportement résultant d’une culture guerrière dans un pays, le Tchad, où porter sur soi une arme est une chose normale et irrépréhensible, c’est l’argument  » imparable  » soutenu par son avocat ce week-end devant le tribunal. Encore que BRADI qui n’avait nullement l’intention d’utiliser l’arme, affirma-t-il, ne savait pas qu’il est interdit de porter sur soi une arme de surcroît chargée en France, soutiendra encore cet avocat. Pourtant, et à sa décharge, BRADI n’en est pas à son premier séjour en France et avait étudié ou séjourné (pour dire peut-être précis) pendant quelques années au Canada pour ne pas être au fait des usages en Occident. Qu’en est-il alors des stupéfiants saisis à domicile ? Le  » petit  » n’est pas dealer, c’est juste une réserve qu’il utilise pour ses petits besoins, coupa sec son avocat.

Ces excuses sont-elles suffisantes pour trouver à Déby fils des circonstances atténuantes ? Faciles peut-être mais toujours est-il que le tribunal a finalement décidé de lui coller six mois de prison avec sursis, trois autres mois étant collés à un de ses compagnons de ce soir-là. Entretemps, à N’Djaména, les autorités tchadiennes ont vite fait, sans doute pour se disculper vis-à-vis de l’opinion, de prendre leurs distances avec l’aîné des fils du président, considéré il n’y a pas longtemps encore comme l’héritier de son père que l’on disait alors très malade. Brahim est majeur et ses actes ne sauraient engager les autorités tchadiennes, affirmait le DG de la Communication à la présidence dans un communiqué de presse publié à N’Djaména où le président Déby lui-même décida, par un décret, le limogeage de son fils du poste de conseiller technique à la présidence. Poste qu’il occupé depuis son éviction de celui de Secrétaire particulier de son père au profit de la nouvelle première dame, Hinda Déby Itno. Mais cela est-il suffisant pour écarter l’idée d’une intervention politique pour trouver une issue peu salissante au fils Déby? Parrain de la FrançAfrique, le président Jacques Chirac qui, à en croire ses détracteurs, s’est occupé des sales dossiers à lui refilés par certains dictateurs africains tels Sassou, Bongo et Déby, est un ami personnel de ce dernier, comme c’est le cas avec les premiers cités, et il n’est pas exclu que l’Elysée soit alors intervenu pour ménager, une sortie acceptable au fils de son ami. Des manoeuvres en sous main de Chirac pour sortir du pétrin l’enfant terrible des fils à Déby Itno pourrait-on donc dire. Agé aujourd’hui de 27 ans (son géniteur lui en donnait 26 l’an dernier pour réfuter son intention de lui passer le témoin), Brahim Déby Itno, rentré des études au Canada, n’en est pas là, selon des témoignages relayés quelques fois par la presse locale, à ses premières frasques. Enfant gâté et difficile, l’aîné des fils Déby ? La question reste tout de même posée et les frasques parisiennes de BRADI offre, à l’occasion, des choux gras à l’opposition du président Déby pour tirer sur les travers d’une dynastie qu’il voulait instaurer et dont le premier prince devrait justement être celui-là.

Maxwell N. Loalngar
Le Temps N° 482 du 7 au 13 juin 2006


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