Moudéina, le revers de l’Ant: NOTRE TEMPS N° 253 du 4 avril 2006
La fin de mois de mars a été particulièrement sanglante pour l’Armée nationale tchadienne et les rebelles de l’est. En l’espace d’une semaine et après l’offensive du 20 mars dernier contre les rebelles du Scud de Yaya Dino et du Rpj de Abakar Tollimi dans la région montagneuse de Hadjer Marfaïne à l’Est (Notre Temps n°252), c’est au tour de Fucd de Mahamat Nour d’être attaqué jeudi 30 mars dernier dans les localités de Moudeina et d’Adé situées à environ une centaine de km au sud de Adré.
Combats meurtriers à Moudéina.
Tout a commencé vers 11 heures du matin en cette journée de 30 mars pour finir tard dans la soirée. C’était une attaque surprise planifiée et menée par les forces gouvernementales ayant à leur tête le chef d’Etat major de l’armée de terre de l’Ant, le général Abakar Youssouf Itno contre une des positions des rebelles du front uni pour le changement démocratique (Fucd) dirigé par le colonel Mahamat Nour. Mais cette attaque, à en croire certaines sources, a tourné en défaveur de l’Armée nationale tchadienne qui a été embusquée par les rebelles qui auraient le dessus sur les forces gouvernementales. Pour l’instant, les deux camps, les forces gouvernementales et les rebelles, reconnaissent que les combats qui se sont déroulés ce jeudi ont été extrêmement violents. Mais le bilan donné par les deux camps reste mitigé.
Le Soudan est accusé
Du côté gouvernement, c’est Ahmad Allam-mi, ministre des Affaires étrangères qui est monté au créneau pour accuser le Soudan d’être à l’origine de cette attaque organisée par les milices Djanjanwid et les « mercenaires tchadiens « , allusion faite aux rebelles du Fucd. Par conséquent, Allam-mi a demandé à la communauté internationale, au président en exercice de l’Union africaine (Ua), le Congolais Dénis Sassou Nguésso, au président de la commission de l’Ua, Alpha Oumar Konaré et au Guide libyen, Muammar Khaddafi d’appeler le Soudan à respecter ses engagements c’est-à-dire les accords de Tripoli du 08 février dernier, Le Cemat de l’Ant a été tué Quant à son collègue de l’Administration du territoire, Mahamat Ali Abdallah Nassour, qui l’a relayé vendredi 31 mars; au cours d’un point de presse, il a présenté le bilan de l’attaque en annonçant que les forces gouvernementales ont « repoussé vigoureusement » l’attaque des assaillants. Avant de déplorer la mort du chef d’Etat major de l’armée de terre, le générai Abakar Youssouf Itno.
Aussi, il a déclaré sans aucune autre forme de précision que. » dix soldats tchadiens ont été tués et une cinquantaine d’autres blessés au cours de combats ». Côté des » assaillants », le gouvernement a indiqué qu’une centaine de rebelles ont été tués.
Le bilan de rebelles
Mais selon les rebelles, le bilan de l’attaque établi par le gouvernement cache les réalités. « La victoire est certaine et les lendemains qui chantent pour bientôt « , annonce Laouna Gong Raoul, porte-parole du Fucd. De même source, «la horde des mercenaires à la solde de l’autocrate a eu la réplique qu’elle mérite et a été mise en déroute, les survivants en débandade seraient activement pourchassés par les forces du Fucd, a -t-il déclaré dans un communiqué avant de souligner qu’en attendant le bilan définitif de l’action aventurière de l’Ant, le Fucd annonce provisoirement ce qui suit: « des lourdes pertes humaines dont celles du colonel Bahr Sinine Itno, commandant d’opération de Tiné, et le général Abakar Mahamat Youssouf Itno, chef d’Etat major de l’Armée de terre « , tous deux neveux du président Idriss Déby Itno. Des centaines de morts et plus de 400 prisonniers de guerre dont un général et des nombreux ralliements des officiers et soldats aux côtés des forces rebelles. Sur le plan matériel, le communiqué du Fucd fait mention de deux chars qui ont été récupérés, un autre détruit et 28 Toyota saisies. Mahamat Nour, leader des rebelles du Fucd de commenter que l’ennemi a laissé d’innombrables corps sans vie et après une débandade la débandade totale de L’Ant. Celle-ci serait pourchassée jusqu’aux alentours d’Adré, a-t-il indiqué.
Inquiétudes des travailleurs humanitaires
Des sources humanitaires ont confirmé les ampleurs de ces combats mais sans donner des détails sur les dégâts humains et matériels. Cependant, on souligne que les récentes attaques du 20 et 30 mars de l’Ant contre les positions rebelles basées près de la frontière soudanaise de Darfour déjà instable ont provoqué les déplacements de milliers de civils tchadiens estimés à 25 000. Les humanitaires opérant dans la région ont exprimé leur inquiétude face à cette violence et surtout avec le renforcement des militaires dans la région de l’est du Tchad, cela pourrait entraver l’aide humanitaire aux réfugiés soudanais.
Diimrabé Nadji-Adiim
NOTRE TEMPS N° 253 du 4 avril 2006