La déraison – La Une Notre Temps N° 256

une Tel un animal blessé, Idi est sur tous les fronts depuis l’assaut des éléments du Fuc sur N’Djaména et Adré le 13 avril dernier. Conférence de presse, meeting, interview tout est prétexte au chef de l’Etat pour vilipender les « ennemis extérieurs » de la nation que sont le Soudan d’El-Béchir, la Banque mondiale et dans une certaine mesure la communauté internationale au premier rang de laquelle l’Union africaine accusée de passivité dans le drame tchadien. L’occasion faisant le larron, les différents bateliers durégime en mal d’inspiration et d’argumentaire en cette phase de campagne électorale ont vite fait de trouver de quoi pérorer devant les auditoires.  » Le Soudan veut déstabiliser le Tchad, la Banque mondiale veut l’asphyxier ; la communauté internationale ne fait rien. » Soit, mais ce que feignent d’ignorer, les stratèges du Mps, c’est que ces vieilles recettes consistant à susciter la sympathie populaire en externalisant les problèmes internes, en désignant des boucs émissaires sont aujourd’hui désuètes. Les populations, mieux informées, mieux éduquées et mieux édifiées sont devenues difficilement embrigadables dans ces genres de clichés. Ce n’est un secret pour personne aujourd’hui que la guerre du Darfour autant que les rebellions de l’Est, de l’Ouest et du Sud sont la conséquence logique de la politique incendiaire, exclusionniste et autocratique de Déby.

Au demeurant, les menaces du régime contre les « ennemis extérieurs » du Tchad passent pour être impopulaires et contre productives dans le contexte actuel. Sinon qu’ils ont l’air des chantages d’un tyran esseulé et isolé sur la scène nationale et internationale et qui joue son va-tout. A propos du bras de fer avec la Banque mondiale en particulier, les experts s’accordent à dire que la fermeture annoncée pour la fin du mois d’avril des vannes du brut de Doba sera tout simplement suicidaire pour le pays et même pour le régime Déby. Du fait qu’en dehors de la rupture des différentes taxes perçues par le Trésor public qu’engendre l’exploitation du brut, cette fermeture va occasionner la mise en chômage des entreprises sous traitantes ainsi que des milliers de travailleurs tchadiens. Sur une autre dimension, les compagnies pétrolières réputées faiseurs de rois en Afrique, pourraient, dans cette situation d’affront, sortir leurs griffes à l’encontre de Déby en apportant leurs appuis aux mouvements armés qui n’attendent qu’un coup de pouce pour lancer l’assaut afin de prendre les rênes du pouvoir. On annonce d’ailleurs que l’opposant Timan Erdimi qui vise le fauteuil de Déby a été reçu la semaine dernière par les responsables du consortium au pays de l’oncle Sam. De quoi donner donc matière à réflexion au locataire du palais rose. Au plan humanitaire, le refoulement annoncé des 200 milles réfugiés du Darfour vers un autre pays d’accueil est une autre bourde aux conséquences graves pour le pays. Non seulement cette menace va à l’encontre des traités et conventions internationaux dont le Tchad est signataire, mais sur le plan pratique, la déportation des réfugiés du Darfour dans un autre pays ressemble à une volonté de transposer le champ géographique d’un conflit dont la responsabilité du régime Déby en la matière ne fait plus de doute. De la même manière, la mise à l’index de l’Union africaine qualifiée d’inerte et de la communauté internationale qui ne réagirait pas suffisamment face au « génocide » d’El-Béchir n’est qu’une fuite en avant d’un Déby désormais installé de plein pied dans un syndrome de fin de régime et qui voudrait détourner le regard de tous des vrais maux qui minent le Tchad en entier.

La rédaction – NOTRE TEMPS N° 256 du 25 avril 2006


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