Observations et commentaires par rapport à l’article de Lyadish Ahmed : ‘’Pour que le débat remplace le combat !’’

J’ai lu avec beaucoup d’intérêt votre article intitulé : « pour que le débat remplace le combat » paru sur le site Ialtchad. Vous avez abordé sans détours et avec beaucoup d’objectivité plusieurs points chauds de l’actualité tchadienne. Votre analyse est très pertinente et démontre à suffisance votre connaissance de la nature du régime de Deby et aussi de cette énième démarche entreprise par les soi-disant opposants au régime. Aussi, serais-je d’avis que si la guerre était une solution, nous aurions dû résoudre nos problèmes depuis belle lurette. D’ailleurs, notre compatriote Enoch DJONDANG a souligné à maintes reprises le non-fondé de cette guerre fratricide.

Vous n’êtes pas non plus sans savoir que les Tchadiens, dans leur grande majorité, aspirent à la paix. Toute initiative qui pourrait contribuer à ramener la paix de manière pacifique est toujours la bienvenue et ce, d’où qu’elle vienne. Cependant, à l’état actuel des choses, je suis vraiment pessimiste quant à l’émergence d’un débat franc et sincère et ce, pour plusieurs raisons :

  • Primo, pour qu’il y ait un débat, il faut d’abord un minimum de volonté politique, de sincérité et de franchise. Malheureusement, le régime en place et en l’occurrence le président Deby n’est pas un interlocuteur ouvert. Ce dernier hait les confrontations des idées, les bonnes initiatives, les points de vue contraires et le débat démocratique. Il ne respecte aucune loi, aucune règle du jeu, aucune parole donnée et aucun accord. Il n’a aucune notion de l’État de droit, de l’intérêt national, d’une bonne gestion, de la bonne gouvernance, de la primauté du droit sur l’arbitraire etc. Il encourage l’insécurité, la corruption et le vol. Il ne se retrouve que dans le désordre, l’impunité et la guerre. Il n’excelle que dans la fourberie, la traîtrise et les forfaits. Deby a fort longtemps cessé d’être le président de tous les Tchadiens; il a une idée singulière de la République. Pire, il a transformé le Tchad à un royaume dans lequel, il s’est constitué une forteresse pour mater toute action de nature à déstabiliser le royaume des Itno. Alors, si tel est le comportement du premier citoyen, où irons-nous avec un débat franc et sincère? Et à quoi cela pourrait-il aboutir?
  • Secondo, si certains compatriotes préfèrent la lutte armée comme forme d’expression, ce n’est pas de gaieté de cœur, j’y parle en connaissance de cause et d’ailleurs, j’en ai payé le prix. S’ils privilégient cette forme de lutte, c’est parce qu’ils sont arrivés à la conclusion que le régime actuel n’est pas de nature à accepter un changement par la voie pacifique. Mieux encore, observons seulement l’opposition civile, celle dite démocratique. N’est-ce pas cette opposition, qui essaie depuis des années, contre vents et marées, pour ne serait-ce qu’obtenir quelques concessions sur certains points cruciaux de la lutte démocratique est à bout de souffle. Elle semble être plus active hier qu’aujourd’hui. Pis, l’intelligentsia qui est censée orienter, guider, contredire, malgré quelques exceptions, sombre dans l’obscurité et adopte la politique de l’Autriche. Tous ceux-ci ne sont-ils pas des signes avant-coureurs d’un découragement de la lutte par la voie démocratique? Aussi, où en est-on avec la fameuse démocratie promise en décembre 1990? Dix sept ans plus tard, nous assistons à des élections tripatouillées, à des crimes odieux, à des viols quotidiens, à une insécurité généralisée, à un bradage et une dilapidation systématique des ressources du pays, à des ingérences étrangères…
  • Tercio, pour ce qui est de la fameuse initiative entreprise par l’ancien président Weddeye et consorts, elle me fait rappeler l’histoire d’un ancien dirigeant du Front Polisario qui, après 17 années de lutte décide de rentrer au bercail. Ce dernier, en manque d’arguments pour justifier sa défection, disait ceci: «maintenant j’ai compris que je faisais fausse route ». Un autre militant de répondre : «s’il vous a fallu 17 ans pour comprendre que vous étiez sur la mauvaise voie, alors il vous faudra encore 17 ans pour savoir si vous avez vraiment pris la bonne voie».

Finalement, cette option n’est pas nouvelle; elle est sur la table depuis fort longtemps, mais seulement personne n’ose recourir à cette option puisque les résultats sont connus d’avance. Ainsi, toutes les tentatives entreprises en ce sens se soldèrent en échec et la crise demeure intacte pour ne pas dire plus. La question est de savoir si vraiment ceux qui s’agitent aujourd’hui cherchent vraiment à résoudre le mal tchadien ou ont-ils renoncé carrément à la lutte pour un État de droit et une vraie démocratie? Ou ont-ils trouvé simplement que les résultats escomptés tardent à venir? Le citoyen averti et désabusé se demande s’il n’y a pas d’autres calculs politiciens derrière ce genre de démarches?

Nassouradine Abdoulaye.I. Haggar
nasidriss@hotmail.com


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