Idriss Deby Itno: Quel bilan après 17ans ?
Note N#: 005 /P/CE/FRAP/2007
Le Chef de l’Etat tchadien, le Général Idriss Deby Itno n’est pas un <Combattant assimilé> mais plutôt un militaire professionnel, ayant régulièrement suivi sa carrière militaire. Avant d’accéder à la tête de l’Etat tchadien, il a assumé des hautes fonctions dans l’Armée, sous le régime de l’ancien président Hissein Habré. Cette expérience militaire l’avait permis certes de conquérir et prendre le pouvoir en Décembre 1990, mais ne l’a pas non plus empêché d’échouer lamentablement sur le plan politique et le dans le domaine militaire. Le bilan économique et social sera publie dans un autre article.
– Sur le plan politique, ldriss Deby Itno, malgré ses seize années de pouvoir, n’a pas réellement réussi à restaurer la paix et la stabilité sur l’ensemble du pays. Même si on lui accorde le bénéfice du doute, avec ses déclarations fracassantes, ses multiples promesses et son engagement affiché, en fait son régime est resté fragile et toujours contesté. Son parti, le Mouvement Patriotique du Salut, MPS, malgré ses gros moyens souvent usurpés de l’Etat, n’a jamais réussi non plus à rassembler, ni à convaincre beaucoup des Tchadiens. Et ses réelles activités n’apparaissent que durant la période électorale, considérée par les dirigeants et les militants comme une occasion de se positionner ou de se remplir un peu les poches. Malgré sa stratégie de déstabilisation des autres partis de l’Opposition afin d’avoir toujours quelques formations politiques à sa dévotion, il n’arrive pas à faire adhérer l’ensemble de la classe politique tchadienne au pouvoir.
Bref, comme ce parti n’a pas de base populaire réelle, il n’existe qu’avec le Chef de l’Etat. Si le pouvoir du président Deby s’écroule par malheur, le MPS disparaîtra aussi immédiatement comme le cas du MNRCS de Tombalbaye ou de l’UNIR de Hissein Habré. Comment expliquer cette situation d’un parti politique au pouvoir qui dirige le Tchad depuis plus de seize ans ? Ces interrogations ne constituent pas simplement une vision négative à l’égard du parti du président Deby, mais plutôt une réflexion profonde valable aussi pour d’autres formations politiques tchadiennes.
– Sur le plan militaire, c’est vraiment dommage pour le Tchad. L’échec du président Deby Itno dans le domaine militaire pourrait s’expliquer par deux causes. La première serait simplement son incompétence notoire de réorganiser l’Armée Nationale tchadienne et de faire de nos militaires, les défenseurs de notre pays et de son intégrité territoriale. Le Tchad est connu depuis toujours comme un des pays du continent africain ayant des hommes valides, aptes et surtout braves pour constituer une Armée solide. Le président Deby n’a pas su mettre en valeur ces atouts pour sa nation. La seconde serait son refus délibéré ou sa mauvaise volonté de vouloir systématiquement détruire l’Armée tchadienne au profit de sa Garde prétorienne, composée en majorité des membres immédiats de sa tribu, élargis rarement aux Tchadiens d’autres régions du pays.
Considérant la première cause, c’est vraiment inadmissible pour un Officier Supérieur sorti de l’Ecole de guerre et ayant acquis des connaissances doublées d’une certaine expérience professionnelle. Et pour la seconde cause, c’est encore lamentable pour un Chef d’Etat qui a gouverné plus de seize ans et qui a de l’ambition de conduire encore la destinée de son pays. Malheureusement sa stratégie militaire égocentrique s’est retournée contre lui-même avec la désertion en cascade des ses alliés ou parents et l’implosion de sa Garde présidentielle, considérée injustement comme l’élite de notre Armée nationale.
Le drame de cette Armée tchadienne est qu’elle a été dénaturée des principes universels des Corps d’Armée. La promotion des Officiers n’est pas liée à l’expérience, mais plutôt à l’humeur du Chef de l’Etat. Les combattants sont mieux et bien traités que leurs Officiers supérieurs formés. Des civils sont devenus un bon matin, des Généraux. Quelque soit leur mérite, serait-il normal qu’un Recteur d’une Université distribue le titre de Doctorat à ses étudiants même s’ils n’ont pas suivi de formation requise et sur une période donnée ? Nous ne sommes pas des militaires, mais nous considérons que l’Armée est un Corps d’honneur et de prestige que n’importe qui ne pourrait pas y accéder, moins encore se permettre de bénéficier de ses grades sans réellement avoir le mérite de les porter.
De plus, les militaires tchadiens ont toujours été utilisés de manière abusive. Que ça soit, en République Démocratique du Congo, pour tenter de sauver les meubles en branle du Maréchal Mobutu, au Congo Brazzaville pour donner un coup de pousse au président Sassou NGuesso, ou encore récemment en République Centrafricaine pour soutenir le général Bozizé à prendre le pouvoir, les militaires tchadiens ont intervenu comme des mercenaires. Au Rwanda où les Forces tchadiennes avaient servi de Police civile, et bien que prises en charge par les Nations Unies, les perdiems qui leur a été payés par l’ONU n’avaient pas été entièrement versés aux concernés. Comment pourrait-on motiver nos militaires de cette manière ?
Pire encore, même chez nous au Tchad, au lieu de protéger nos citoyens, l’Armée nationale a souvent été utilisée pour faire étouffer ou réprimer la résistance des populations locales s’opposant à l’arbitraire du pouvoir. Et sous prétexte de défendre l’intégrité territoriale du Tchad, l’Armée nationale est utilisée abusivement contre les opposants et rebelles tchadiens. En fait, l’Armée est même vivement exhortée à en découdre contre ses propres citoyens et souvent contre ses compagnons d’Armes, contestant l’injustice sociale flagrante dans le pays. Face à cette situation dramatique, que faire pour sortir de cette crise ? Où quelle solution serait-il possible de tenter ?
Quelle solution de sortie de crise?
Notre article va s’envoler dans la nature comme les tourbillons du désert tchadien. Le président Deby Itno semble être plus attentif à ceux qui lui brandissent les canons et lui projettent des roquettes et des missiles. Nos frères de la rébellion armée pensent également juste car le salut du Tchad ne viendrait que de cette option. Néanmoins, nous continuons notre sensibilisation pour permettre aux Tchadiens de trouver vite une solution politique à la situation de notre pays. Et comme c’est le Chef de l’Etat qui prétend détenir la destinée du Tchad en soufflant le chaud et le froid, il doit toujours se sacrifier pour poser actes concrets démontrant sa ferme volonté d’ouverture politique et son engagement clair à partager non seulement son pouvoir, mais aussi les richesses nationales. Le pouvoir tout comme les richesses nationales constituent un patrimoine de l’Etat tchadien, donc ne lui appartiennent pas. Pour éviter des conflits sociaux résultant des grèves des Agents de l’Etat, des conflits politiques et surtout des affrontements militaires issus de la multiplication de la rébellion armée, pour maintenir la cohésion sociale dans notre pays et préserver aussi les revenus découlant de nos recettes pétrolières, le président Idriss Deby Itno, s’il souhaite encore continuer à gouverner le Tchad, il a l’obligation morale de :
1- Faire une réelle ouverture politique de son pouvoir et composer avec ses Opposants politiques légaux et non armées de l’Intérieur et de l’extérieur, mais aussi avec les politico-militaires dans le cadre d’un dialogue inclusif sur des bases objectives et dans l’intérêt national. Les histoires de ralliements à coup de petro dollars, sans changements profonds de notre méthode de gouvernance ne feront que perdurer la souffrance de nos populations et plonger notre pays dans l’anéantissement progressif.
Dans un Etat, le consensus n’est pas seulement de partager le pouvoir avec ses parents et son cercle politique, mais aussi avec tous les Tchadiens, y compris ses adversaires politiques ou politico-militaires d’aujourd’hui qui pourrons être des partenaires sûrs de demain.
2- Changer de méthode de Gouvernance par la reconstitution d’une Administration sérieuse et crédible respectant des principes élémentaires de Droit et de règles de gestion transparente. Nommer des personnalités politiques intègres, responsabiliser des personnalités indépendantes crédibles et des cadres nationaux expérimentes, n’ayant jamais été impliqués dans des détournements de derniers publics et vraiment engages pour le développement du Tchad. Evitons le ridicule en responsabilisant des enfants incapables même d’ouvrir les yeux pour voir en face leur interlocuteur. Comment un novice de moins de 23 ans récemment, Pompiste dans une Station d’Essence à Chicago, pourrait-il être eleve aux fonctions de Coordinateur National du Projet Pétrole du Tchad ? Comment pourra-t-il défendre ce gros Dossier face aux barons de EXXONMOBILE qui ont plus de trente années d’expérience dans ce domaine ?
3- Améliorer le pouvoir d’achat des Tchadiens par une augmentation réelle et significative de 50% des salaires dans la Fonction publique, des pensions des Retraités, des Bourses d’Etudes et de formation des Etudiants et Stagiaires tchadiens de l’Intérieur comme de l’Extérieur. Cette décision pourra permettre à tous de bénéficier de nos richesses nationales, mais aussi de combattre la pauvreté générale et la misère sociale dans le pays. Des Tchadiens de grande valeurs avaient défendu en son temps la cause nationale face aux injonctions abusives de la Banque Mondiale dans nos ressources, mais il est aujourd’hui temps de rappeler que le moment est venu pour permettre à tous les Tchadiens de bénéficier effectivement des revenus de nos ressources pétrolières, afin de permettre de préparer le conditionnement nécessaire du cadre de vie des générations futures.
4- Mettre en place une véritable Armée Nationale et des Forces de Sécurité telles, la Gendarmerie et la Police, sur la base d’un quota clair de recrutement des ressortissants de toutes les régions du Tchad, sans exclusion. Le brassage des différents groupes ethniques sera un des critères objectifs de fondation réelle d’une nouvelle Armée nationale tchadienne. Des principes de valeur doivent être reintégtrés dans les habitudes et la pratique de notre Armée nationale, car le cafouillage dans la médiocrité ne nous mènera nulle part, sinon dans le chaos et l’anarchie des sociétés primitives des siècles passés.
5- Investir dans les structures éducatifs et sanitaires pour améliorer les conditions de travail des Enseignants et du Corps médical. Faciliter l’accès de tous les enfants à l’Education et donner la possibilité aux populations vulnérables comme, les vieillards et les femmes et les enfants, aux services adéquats de santé. La santé et l’Education restent des conditions sine qua non de toute possibilité de développement durable.
6- Adopter des Plans et Programmes de développement à moyen et long terme pour réaliser progressivement d’autres objectifs concrets dans tous les secteurs prioritaires et nécessaires au bien être des populations tchadiennes. Il est surtout urgent de mettre à la disposition de nos populations de l’Eau potable et de l’électricité. Car sans la vulgarisation de ces deux éléments importants, la santé ne sera pas préservée, ni l’Education ne pourra pas aboutir à des ambitions des recherches pointues au niveau national.
7- Procéder à un recensement électoral général des populations tchadiennes en âge de voter et organiser progressivement, avec la participation des Organisations politiques, des Syndicats et des Associations des Droits de l’Homme, des élections législatives et présidentielles libres, transparentes./-
La Coordination des FRAP.
Paris, le 24 Avril 2007
frap.tchad@yahoo.fr