Tchad: Les pilotes français en mission de reconnaissance dans l’est – Afp
Cartes du Tchad étalées devant eux, les deux pilotes de Mirage F1 du dispositif français Epervier, répètent les phases importantes de la mission de reconnaissance pour laquelle ils s’apprêtent à décoller au petit matin de leur base de N’Djamena.
Il reste une demi-heure avant l’envol en direction de la frontière tchado-soudanaise, à près de 1.000 km vers l’est. En combinaison de vol, casques posés sur la table, « Francis » et « Albert », les deux surnoms par lesquels ils demandent à être identifiés, règlent leurs montres.
Sur les murs de la salle de briefing, des avions de combats stylisés survolent des jeunes femmes aux formes généreuses sur des plaques de bois peintes laissées en souvenir par les différentes unités de l’armée de l’air qui se succèdent tous les quatre mois au Tchad.
« Francis », le « leader », revoit avec « Albert », d’une vingtaine d’années son cadet, les étapes essentielles de la mission. Caps, altitudes, vitesses: les chiffres s’accumulent et se mêlent à un jargon incompréhensible pour le non-initié.
« Décollage 7HZ, step entre 25 et 30… » Des deux mains, il mime les positions que prendront les deux avions l’un par rapport à l’autre en vol.
La mission des deux Mirage F1 va durer trois heures. Les pilotes doivent remonter le long de la frontière avec le Soudan. « Albert », à bord d’un Mirage F1-CR (combat et reconnaissance), équipé d’appareils photos, prendra des clichés, appuyé par « Francis », à bord d’un F1-CT (combat tactique).
Deux ravitaillements en carburant sont prévus: chaque avion avale en environ 80 minutes les 6.500 litres de kérosène embarqués dans ses réservoirs.
Dernier point sur les consignes de sécurité, les fréquences de communication et les procédures en cas de pépin et les deux pilotes se dirigent vers leurs appareils respectifs, chacun en compagnie d’un « pistard », un mécanicien avion, avec lequel ils inspectent minutieusement chaque centimètre de leur Mirage.
Avant de monter, chaque pilote fixe à ses mollets et ses cuisses des « rappels de jambe », des sangles qui fixées à son siège maintiendront ses membres inférieurs pour les empêcher de heurter le cockpit en cas d’éjection.
Sous sa bulle de plexiglas, Francis s’isole dans d’ultimes instants de concentration. Les moteurs sont mis en route dans un vacarme amplifié par les parois du hangar de tôle.
Le pistard donne le signal du départ. Une poignée de minutes plus tard, les deux Mirage foncent en trombe vers le ciel à une dizaine de secondes d’intervalle.
Au retour de la mission, les pilotes sont « débriefés » tandis que les clichés partent pour le labo. Trente minutes plus tard, penchés sur une table lumineuse, deux « interprètes photos », « Tic » et « Tac », accompagnés d’un officier de renseignement, observent à la loupe les négatifs.
« Tic » et « Tac », qui ont hérité de ces surnoms sur la base en raison d’une certaine ressemblance physique, sont chargés de déceler sur les photos d’éventuels hommes en armes ou véhicules militaires et d’en déterminer le type et l’armement. Et dire également s’ils appartiennent à l’armée tchadienne ou à des rebelles, dont plusieurs mouvements hostiles au président Idriss Deby Itno sont actifs dans l’est du pays.
Malgré la vitesse de l’avion et l’altitude, les clichés sont d’une netteté et d’une définition étonnantes. Une fois agrandies, on peut compter avec précision le nombre d’hommes armés à bord de plusieurs pick-up…