Les Brèves de N’djaména: Tripoli-Libreville-Cotonou
Tripoli-Libreville-Cotonou – Malgré l’entêtement du médiateur libyen, il n’y a presque rien à attendre de la réunion de Tripoli, le Guide libyen s’étant avéré incapable de faire plus de pression sur Deby. Ceux qui sont venus de Libreville sont repartis, ils sont aux anges, tant Deby les a rassurés de « sa bonne foi, de sa disponibilité entière pour la paix et le développement du Tchad ».
N’y a-t-il pas quelque part un quiproquo ? Ne soyons pas pessimistes, soyons positifs, « donnons du temps au temps ». Quant à la réunion de Cotonou, ses résultats sont prévisibles. Financée entièrement par Deby, la réunion a pour seul but de faire rallier le maximum des « opposants« .
Après Tripoli, la situation se clarifie au sein des différents groupes de la rébellion armée. Dr Eldjineidi (dans les différents maquis, il y a autant des Dr que des Généraux dans l’armée de Deby), dépose les armes. On se rappelle que lors de l’offensive de la coalition RFC/CNT, Eldjineidi et son groupe ont été les principaux obstacles à la poursuite de l’offensive. On se rappelle du tonitruant communiqué d’un certain Bourma, autoproclamé porte parole de la CNT. N’eut été la sagesse de certaines personnes du RFC, il y aurait eu des affrontements fratricides. Dans la confusion, le RFC a préféré rebrousser chemin. C’est de cette période que date la décision définitive de Mahamat Nour de rallier Deby ; à l’époque, ses éléments s’étaient alliés à la coalition.
Depuis cette offensive ratée, le groupe d’Eldjineidi, composé en grande partie des éléments hétéroclites s’est largement désagrégé. Ceux qui sont décidés à combattre le régime, ont regagné d’autres groupes, tandis que d’autres ont regagné leur ferick. A la faveur de son ralliement, Eldjineidi va recruter quelques bergers pour faire le nombre. Quelques généraux en perspective ! Le temps est le meilleur tamis.
Deby – MJE – Dans ses pitreries quotidiennes d’un clown, M. Ahmat Bachir qui remplace dignement le zélé fou fou 3X Dr, a laissé échappé que le régime ne négocie pas avec des interlocuteurs en position de faiblesse. En réalité, il n’a fait qu’exprimer les pensées de son maître. Deby ne regarde l’autre que si celui-ci est en position de force. C’est ce qui se passe en ce moment avec le Chef du MJE, car la réunion d’Arusha, quel qu’en soit le résultat, lui fait perdre le sommeil. De négociateur au conflit du Darfour en ses débuts, le Tchad est devenu partie prenante. On se rappellera des nombreuses réunions tenues à N’djaména et à Abéché et l’omniprésence des négociateurs tchadiens. Au fil du temps, le centre d’intérêt du dossier s’est déplacé à Abuja, Tripoli, Paris, UE…. On n’entend plus parler de la voix du Tchad, pourtant ce n’est par le fait d’un déficit de diplomates. Tout cela n’est que le résultat d’un Deby qui veut souvent une chose et son contraire du même coup. Doucement, mais on s’y achemine, notre IDI ne sera là que pour appliquer les décisions prises ailleurs (corridor humanitaire, pont aérien, déploiement des forces de l’ONU/UA….). Les rebelles soudanais ont bien compris cela.
Brusquement le mal lui en a pris. Alors, notre IDI essaie de rattraper sa bévue en utilisant toujours les mêmes recettes. On se rappellera, il n’y a pas si longtemps, la rébellion soudanaise paradait dans les rues de N’djaména, portait main forte aux forces de Deby en difficulté à Adré, Guéréda Goz-beïda….Et un certain Dr Khalil a même franchi le rubicond en occupant la représentation diplomatique du Soudan à N’djaména et en déclarant, sans prendre les précautions d’usage, sur un ton menaçant, que la survie du pouvoir de Deby était sa priorité.
Comme c’est le cas en ce moment avec Mahamat Nour, le temps des désamours ne tarda pas à pointer son nez. Comme toujours…, disait un célèbre chanteur français. Alors, Deby jeta Dr Khalil comme un malpropre hors du Tchad, après l’avoir dépouillé de ses mercenaires tchadiens. Deby se confia à ses bouffons en ces termes : « je ne donne pas plus d’un mois au Chef du MJE, dans la brousse du Darfour. J’en sais quelque chose. Sous les arbres, il n’y a ni coca ni climatiseur », avait-il ricané. Mais le Chef du MJE a relevé le défi. En un temps record il a eu un renfort impressionnant des éléments soudanais ; il a fait main basse sur les véhicules de son ancien CEM, désormais au service de Deby, au cours d’une bataille éclaire mais décisive. Et puis, au cours d’un raide audacieux dans le Kordofan, il a pu récupérer un nombre important des véhicules et minutions. Très surpris par la tournure que prennent les événements, Deby demanda à son frère de « Sultan » de le mettre immédiatement en contact avec son cousin, le Chef du MJE. Mis en liaison, Deby a tenu des propos que ceux qui sont autour de lui n’ont pas cru à leurs oreilles. Comme quoi……..
Deby – Mahamat Nour – Ce n’est pas encore fini ! La tension est toujours vive. Chaque camp est en état d’alerte maximum. A Mongo, un militaire de Deby laissait entendre que ça va « barder » d’un moment à un autre. Fort du soutien de l’opinion nationale ( ?) et de celui du Guide (ce dernier aurait mis Deby en garde contre toute tentative malveillante vis-à-vis de Mahamat Nour), Mahamat Nour résiste aux nombreuses provocations de Deby et de sa clique. Deby l’a sommé d’effectuer une fouille générale de ramassage des armes, dans la ville de N’djaména. L’ultimatum expire le 8 août. Si d’ici là Mahamat ne s’exécute pas, comme il l’a laissé entendre, qu’adviendra-t-il ? Dans ce bras de fer, Nour a enfoncé le clou en déclarant qu’il ne traitera plus avec Abderahim Bahar, le CEMGA adjoint. « Il y a un CEMGA titulaire et c’est lui et lui seul mon interlocuteur, l’adjoint n’a qu’à prendre les instructions du titulaire », a tranché Nour. Nour ignore beaucoup des aspects de l’administration tchadienne, on doit vraiment le mettre à la page, le briefer : dans l’administration civile et surtout militaire de Deby, c’est toujours le parent de Deby, qui est le Chef, indépendamment du poste qu’il occupe. Que Dieu sauve le Tchad.
Beremadji Félix
N’djaména